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Le logement, un pont entre les générations Energies 374 - Bruno Colombari

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Et si on envisageait la question du logement autrement que d’un point de vue immobilier ? Si on en faisait un moyen pour que les générations se rencontrent et se rendent mutuellement service ? Jeunes adultes d’un côté, retraités isolés de l’autre, et entre les deux le dispositif Citoyen solidaire : les solutions alternatives existent.

Gardanne est désormais une ville étudiante, aux BTS des lycées Fourcade et Valabre se sont ajoutés depuis une demi-douzaine d’années les élèves ingénieurs de l’école des Mines de Saint-Étienne. Mais cette arrivée de jeunes adultes pose un problème de logement : si le projet initial du site Charpak prévoyait un campus avec 330 chambres, moins de la moitié sont actuellement construites.

« Il y a 152 studios et 5 autres réservés aux étudiants handicapés, explique Thierry Ricordeau, directeur de la Maison des élèves. Or il en faudrait environ 200 pour répondre aux besoins. Nous assurons donc le logement pour les première année en priorité (dont la moitié sont boursiers), car c’est un argument important pour qu’ils s’inscrivent à l’école des Mines de SaintÉtienne. Un quart des deuxième année ne sont pas logés sur place, et les troisième année se logent en colocation ou en studio à Gardanne ou à Aix, ou encore en cité universitaire à Aix ou à Marseille. »

En attendant, se loger dans le parc privé relève du parcours du combattant. L’offre est rare sur Gardanne et les prix sont élevés : selon le site location- etudiant.fr, le loyer moyen pour un studio dans notre ville s’élève à 490 €. La colocation peut être une solution, mais encore fautil en avoir les moyens : 590 € pour un T1 et 800 € pour un T2.

En regard, la population retraitée à Gardanne est conséquente : environ 2 600 foyers dont la personne de référence est âgée de 65 ans et plus selon l’Insee. Dont 1 200 sont propriétaires d’une maison individuelle et plus de 900 vivent seules. Autant dire que des conditions favorables sont réunies pour le développement de ce qu’on appelle le logement intergénérationnel.

Derrière ce terme à rallonge, un principe simple : une personne âgée qui vit seule chez elle peut héberger gratuitement un étudiant ou un jeune adulte qui serait prêt à assurer une présence et quelques petits services.

Lors des dernières assises de la solidarité, le principe 1 toit 2 générations avait été présenté par Katia Hamadache, de l’association marseillaise DomoPart. « A Marseille, je gère actuellement huit binômes étudiants/retraités. C’est peu, mais je préfère privilégier la qualité des relations. Je rencontre d’abord la personne âgée, en général ce sont des personnes seules qui ont besoin de quelqu’un chez elles la nuit pour donner l’alerte en cas de besoin. Du côté étudiants, ce sont plutôt des bac +3, majeurs évidemment, et qui ne sont pas en rupture sociale. »

En France, le réseau Cosi (cohabitation solidaire intergénérationnelle) fédère les associations de dix-sept villes et a élaboré une charte (www.reseaucosi. com) qui définit le principe de cette cohabitation : le jeune ne donne pas de soins à la personne et sa présence la nuit se veut avant tout rassurante et ne peut se transformer en garde malade, ni avoir vocation à décharger la famille de ses obligations (visites, devoir d’assistance).

A Gardanne, le dispositif Citoyen solidaire traite depuis quelques temps des demandes de personnes âgées intéressées par l’accueil d’un jeune chez elles ou de parents qui cherchent un logement pour leur enfant étudiant. Comme l’explique Jean-Brice Garella Conseiller municipal en charge de la solidarité : « Ici, le potentiel est évident : nous avons d’un côté des personnes âgées avec des maisons plutôt grandes, avec de la place et parfois des espaces aménagés en studio pour leurs enfants, et de l’autre côté des étudiants qui arrivent. De plus, les étudiants n’ont pas vocation à rester longtemps au même endroit, il y a un brassage, du mouvement. Mais c’est aussi un prétexte à créer du lien, c’est une passerelle pour nouer des relations entre jeunes et retraités. Dans ce cadre, les critères humains sont essentiels. “Citoyen solidaire” est là pour faire les bonnes connexions, mettre les personnes où il faut en fonction des demandes. N’oublions pas qu’en face de l’offre, il y a un engagement sur des services à rendre. »

Maryse a eu recours à ce principe pour sa mère pendant six ans, de 2004 à 2010, avant que cette dernière ne soit admise en maison de retraite. Six personnes, dont trois étudiantes, ont été hébergées (moyennant une participation modeste pour les charges) successivement, sans aucun problème. « Ma mère était au rez-de-chaussée et la personne hébergée à l’étage avec une chambre et des sanitaires indépendants. C’était surtout une présence la nuit, et quelques petits services comme des courses de dépannage. C’est une très bonne solution car il y a un vrai échange entre les deux, des liens se créent, chacun raconte à l’autre ce qu’il fait. Par contre, ce n’était pas facile de trouver quelqu’un après chaque départ, car je me débrouillais toute seule. »

Mais le principe du logement contre services existait déjà, même si ce n’est pas vraiment de l’intergénérationnel. En janvier dernier, Philippe, demandeur d’emploi, alors hébergé temporairement chez sa soeur, voit une annonce dans énergies, contacte Citoyen solidaire qui le met en relation avec Jean-Claude, qui propose un logement gratuit contre quelques travaux de jardinage. L’affaire est conclue rapidement.

« Avant Philippe, nous avions accueilli une étudiante et une personne en difficulté. Il y a quelques mois, je suis passé au CCAS pour dire que j’avais un logement disponible. On m’a conseillé d’aller voir “Citoyen solidaire.” Avec Philippe, on s’est mis d’accord et tout se passe bien. On se voit quand il y a quelque chose à faire, on prend aussi l’apéro ensemble. Et quand on n’est pas là, ça fait une présence sur le terrain.  » Pour Philippe : « la taille et l’entretien du jardin, j’ai fait ça pendant treize ans, je connais. Ici c’est calme, on est à la campagne. Si un jour je ne suis pas là, je le tiens au courant, c’est normal. Je cherche du travail, et pour moi c’est une solution qui me convient. »

Vous êtes retraité(e), vous ne voulez pas rester seul(e) et vous avez une chambre libre, vous êtes en formation à la recherche d’un logement et prêt à partager des moments de convivialité avec un aîné, contactez Citoyen solidaire qui vous accompagnera dans vos démarches et qui vous mettra en relation.

Espace Citoyen Solidaire
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