Sortie du livre "Les Gueules noires de Provence"

1744-2003 : c'était la mine Bruno Colombari

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Quatre historiens de l’UMR Telemme, à Aix, ont écrit une histoire du bassin minier intitulée “Les gueules noires en Provence” qui vient de paraître. Deux des auteurs, Xavier Daumalin et Olivier Raveux, reviennent sur ce travail collectif.

Comment avez-vous procédé pour écrire cet ouvrage ?

Xavier Daumalin : Nous avions trois angles d’approche : les débouchés du charbon sur la longue durée, ce qui change, ce qui perdure à travers les siècles. Puis l’évolution des techniques : la mine de Provence a souvent été en pointe sur la technologie : les grosses machines à vapeur, la Galerie de la mer, le premier prototype de locomotive électrique à courant triphasé, la mise au point du soutènement marchant... Et enfin, le social, depuis les paysans-mineurs aux gueules noires, le paternalisme des industriels, la question du logement, de l’éducation, de la santé, les grandes luttes syndicales...

Olivier Raveux : L’idée, c’était de faire une histoire globale de la mine, montrer en quoi ce Bassin était original dans l’histoire minière. On a traité ces trois points dans chacune des trois parties chronologiques, des origines à 1838, de 1838 à 1945, de 1945 à la fermeture.

Quel a été le rôle du bassin minier de Provence et en quoi est-il différent des autres ?

OR : Le modèle du mineur paysan dure plus longtemps qu’ailleurs. Ici, la provenance des étrangers est aussi plus variée à cause de la proximité de la Méditerranée. Et vers la fin de l’exploitation, des mineurs d’autres bassins sont arrivés.

XD : En Provence, l’histoire industrielle est souvent passée sous silence, aujourd’hui encore. On n’est pourtant pas passé de l’agriculture au tertiaire sans connaître une certaine industrialisation. Le bassin minier fait pleinement partie de cette histoire souvent occultée. La mine a aussi joué un rôle important lors des deux guerres mondiales.

Qu’apportera votre livre à l’histoire de la région ?

XD : Nous avions déjà travaillé sur beaucoup d’autres branches de l’industrie locale, mais il manquait une pièce essentielle à notre puzzle : la mine. Nous avons désormais une meilleure vision d’ensemble de l’histoire économique et sociale des BdR. L’histoire de la mine dispose maintenant d’un cadre explicatif général qui pourra ensuite être approfondi sur tel ou tel point, notamment sur le travail des femmes. Nous avons essayé d’avoir un texte sérieux, reposant sur de nombreuses archives, mais accessible à tous.

Les gueules noires de Provence.
Histoire du bassin minier des Bouchesdu- Rhône (1744-2003),

Xavier Daumalin, Jean Domenichino, Philippe Mioche, Olivier Raveux,
éd. J. Laffitte, 300 pages, 40€

Trois cents pages d’histoire

Les plus anciennes traces de l’exploitation du charbon en Provence remontent à octobre 1443. Mais jusqu’à l’arrêté royal de 1744, les documents sont rares. C’est ce qu’explique Olivier Raveux dans la première partie du livre, qui va jusqu’en 1838. Xavier Daumalin prend le relais jusqu’en 1945, période de forte croissance, aussi bien des techniques, que des effectifs et des luttes sociales. Il raconte notamment le combat vital contre l’eau qui envahit les galeries (ce qu’elle fait d’ailleurs à nouveau depuis deux ans), les débuts du syndicalisme minier et le paternalisme des dirigeants. La nationalisation (1946) donnera beaucoup d’espoirs qui seront vite trahis, malgré la reprise de 1981. C’est la dernière partie racontée par Philippe Mioche et Jean Domenichino, qui abordent évidemment les épisodes amers du pacte charbonnier et des conditions de la fermeture. Les 150 illustrations (dessins, photos, plans, souvent en grand format) justifient le prix élevé (40€) d’un livre qui fera date..