Economie

Inquiétudes pour l’emploi Energies 312 - Stéphane Conty

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Que ce soit en relation avec la crise économique mondiale ou pour des raisons plus liées à des "stratégies d’entreprises", l’emploi est menacé chez certains poids lourds industriels du bassin minier. Une menace qui, si elle se matérialise, pourrait avoir de graves conséquences pour l’ensemble de l’économie locale.

Coup de tonnerre dans la sphère de la microélectronique française, et plus particulièrement en Paca, le 5 février dernier après l’annonce par Atmel, (l’une des deux principales entreprises de la zone de Rousset avec ST Microelectronics), de son souhait de vendre son site local.

Atmel, entreprise américaine, se donne 12 mois pour vendre son activité Asic et tous les moyens de production qui y sont rattachés, ce qui concerne notamment les sites de Rousset et d’East Kilbride en Écosse. A Rousset est donc installée une unité de production qui emploie quelques 1 337 personnes.

En septembre 2008 déjà, un plan social avait entraîné 160 suppressions de postes. Et si les conséquences d’une vente prochaine du site sont difficilement mesurables (les syndicats prévoient au moins 300 suppressions d’emplois), en cas de fermeture ou de délocalisation elles s’avéreraient désastreuses pour l’emploi et l’économie régionale : augmentation des coûts de production de la concurrente ST Micro - electronics, mise en difficulté de nombreuses entreprises, clients et sous-traitants, ainsi que du pôle de compétitivité Solutions Communicantes Sécurisées et de Cimpaca dans lesquels Atmel est l’un des principaux acteurs.

Une situation qui remet aussi en question la pertinence des millions d’euros investis par les pouvoirs publics dans certaines entreprises privées et les exonérations fiscales, au nom de la pérennisation de l’emploi. Ainsi depuis son implantation à Rousset Atmel aurait perçu 90 millions d’euros de subventions de la part des pouvoirs publics, notamment pour de la recherche et développement, et a été exonérée de Taxe Professionnelle par la Communauté du pays d’Aix de 2002 à 2006.

L’alumine dans la tourmente... sauf pour les actionnaires

Si la situation d’Atmel est des plus préoccupante, il en va de même pour le site de production d’alumine gardannais de Rio-Tinto (ex Alcan, ex Pechiney). Le site qui a produit 640000 tonnes d’alumine en 2008 prévoit pour 2009 environ 325 000 tonnes.

« En mars nous allons produire 22 000 tonnes au lieu des 44000 prévues explique Jo Selva, délégué syndical. Après trois jours de congés obligatoires en février, nous allons en avoir deux en mars et deux en avril. Nous n’excluons pas, à terme, l’hypothèse d’un chômage technique. Notre volume client demeure, mais notre volume de vente a chuté car les clients achètent moins. »

Avec une production moindre, l’entretien et les coûts associés sont également revus à la baisse. « C’est l’équivalent de 20 emplois temps pleins qui ont ainsi été supprimés pour les sous-traitants en charge de l’entretien. Nous avons également 20 emplois d’intérimaires en moins sur le site. »

Une situation d’autant plus inquiétante que les mesures annoncées fin 2008 par Rio Tinto pour le groupe sont loin d’être optimistes avec réduction de son plan d’investissement 2009, désinvestissements et mise en vente de certaines de ses activités et surtout suppression de 14 000 emplois dans le monde. Une annonce optimiste toutefois  : le maintien du dividende 2008 par action. Voilà qui va rassurer les actionnaires. En attendant, sur le site de Gardanne, c’est l’incertitude sur l’évolution de la situation pour les mois qui viennent.

« Nous avons un projet pour pérenniser l’entreprise »

Autre incertitude à la centrale thermique où l’on ne sait toujours pas si le groupe combiné gaz va se faire. Actuellement la centrale produit de l’électricité avec 2 groupes au charbon, l’un de 250 mégawatts (Mw) et l’autre de 600 Mw. En 2005, un programme pluriannuel d’investissement (PPI) décidé par les industriels du secteur (Endesa à l’époque pour le site de Gardanne) et l’État, prévoyait la réalisation d’un groupe combiné gaz à la centrale thermique de Gardanne-Meyreuil qui devait entrer en fonction en 2009-2010.

Depuis le projet est "dans les cartons", et le groupe E.on, propriétaire de la Snet (dont dépend le site de Gardanne) depuis juin dernier n’a encore rien annoncé à ce propos. « Lors de sa venue, le nouveau directeur de la Snet et président d’E.on France, Luc Poyer, a répondu à certaines de nos revendications en terme de pérennisation d’emplois et d’autres sont en cours de négociation. Mais en ce qui concerne le nouveau groupe combiné gaz, il a déclaré ne pas pouvoir donner une réponse avant début avril » explique Nadir Hadjali, délégué CGT à la centrale de Gardanne.

Sur les deux groupes existants l’incertitude demeure également. « Le groupe 250 Mw peut tourner jusqu’en 2015 mais après il faudra des aménagements pour une mise en conformité environnementale. Là on nous dit qu’E.on n’a pas encore de plan pour cette tranche. Je vois mal comment le premier fournisseur d’électricité privé au monde peut ne pas avoir un projet à 5 ans ! »

Une situation d’autant plus incompréhensible que la région Paca connaît de grandes difficultés pour son alimentation électrique. « L’État est actionnaire de la Snet pour 35%. Le gouvernement nous dit qu’il faut relancer l’économie par l’investissement. Là nous avons un projet pour pérenniser l’entreprise et un besoin fort de la région en électricité. C’est à l’État de prendre ses responsabilités. En tous cas si nous n’avons pas de réponse en avril sur le combiné gaz, nous, nous saurons prendre les nôtres. »