Miguel Angel Estrella, passeur d'étoiles Energies n°473 - 26 avril 2017 - Bruno Colombari

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Pendant quatre jours, l’un des plus grands pianistes vivants s’est installé à Château-Pitty, parmi les enfants gardannais d’Orchestre à l’école avec qui il a parlé de Bach, Haendel, Messi et Maradona.

UN RIDEAU NOIR, UN QUATUOR À CORDES, UN PIANO À QUEUE STENWAY ET LA MUSIQUE DE BACH qui semble sortir des doigts de Miguel Angel Estrella.

Ce mardi 4 avril, la salle polyvalente de l’école Château-Pitty s’est transformée une heure durant en salle de concert copieusement garnie par les élèves, les enseignants, les parents, les grands-parents venu écouter le message de cet homme de 76 ans qui a connu la torture dans les prisons uruguayennes. « La musique est beaucoup plus forte que la parole, elle est universelle, c’est une manière d’être ensemble. »

Invité dans le cadre d’Orchestre à l’école, le pianiste argentin a donné sans compter auprès des enfants gardannais, qui s’en souviendront toute leur vie. Car cet immense musicien qui a côtoyé les plus grands n’a pas oublié d’où il vient : « Quand j’avais dix ans, j’étais en adoration devant une femme admirable qui avait fait construire des foyers-écoles pour les enfants pauvres [Evita Peron, NdlR]. Chaque année, le 26 juillet, je joue pour elle. J’ai une pensée aussi pour le père Joseph Wresinski, le fondateur d’ATD Quart-Monde, un homme exceptionnel. »

« JE SUIS IMPRESSIONNÉ PAR CE QUI SE PASSE ICI »

Avec les minots de Gardanne, il parle musique, bien sûr, mais aussi football. Quand ils lui demandent s’il connaît Lionel Messi, il leur raconte Diego Maradona.

Pendant que le quatuor joue du Gershwin, il fait des grimaces aux bambins assis par terre, puis il ferme les yeux en écoutant la musique de Carlos Gardel ou d’Astor Piazzola... « Je suis impressionné par ce qui se passe ici, par cette idée de mettre ensemble des enfants, des parents et des professeurs. C’est quelque chose de spécial, un orchestre où les enfants font de la musique et jouent au foot, discutent, critiquent, c’est la vie ! J’avais entendu parler de cette expérience ici, mais c’est la première fois que je travaille avec des familles issues de toutes les cultures. C’est l’expérience la plus riche qu’il m’a été donné de connaître. »

Ce qu’il a lui même cherché en créant Musique Espérance, en militant infatigable pour la paix, réunissant dans le même orchestre des musiciens musulmans, juifs et chrétiens.

Le mercredi matin, il est encore à pied d’oeuvre pour la répétition générale de Cendrillon qui doit être jouée avec les enfants le jeudi à Aix, au Grand théâtre de Provence. Et pendant la récré, penché sur son piano, il joue la Sarabande de Haendel avec une douceur infinie. Car tout comme les grands artistes, l’essentiel pour lui c’est le jeu, pas le décorum ou le protocole. Avec son prénom d’ange et son nom d’étoile, ce petit homme est un géant.