Un peu moins d’un an après son acquisition par la commune, la métamorphose du Centre Saint-Pierre est frappante : salles remises à neuf, matériel informatique de pointe, organismes de formation (ADREP, ADIF et GRETA) installés, étudiants en séminaire... C’est avec une légitime fierté que François Agier, directeur du centre microélectronique de Provence, fait visiter les locaux qu’il occupe, au rez-de-chaussée du bâtiment principal. Il y passera le temps d’un bail, soit les trois années nécessaires à la construction des bâtiments du futur centre à Château-Lorrain. D’ici là, l’école montera doucement en puissance. Pour l’instant, l’heure est à l’installation, au déballage du matériel (dont une partie est encore sous des housses plastiques) et aux essais. "On ne passe pas de zéro à 660 étudiants en un clin d’œil. Il faut procéder par phases, élaborer le contenu des cours, recruter des enseignants..."
C’est pourquoi les premiers étudiants en formation de microélectronique n’arriveront à Gardanne qu’en septembre 2003. Entre temps, il y aura bien des étudiants sur le site, mais pour des séminaires d’une semaine, ponctuellement. Ainsi, lors de la première semaine d’octobre, 25 étudiants de troisième année en IGI (ingénierie et gestion industrielle) ont découvert les locaux, testé le matériel tout en suivant des cours de négociation. Sur les marches du bâtiment A, dont l’entrée est surmontée d’un grand panneau Centre microélectronique de Provence Georges Charpak, Robert Germinet le directeur de l’école des Mines de Saint-Étienne discute avec ses étudiants qui goûtent avec plaisir la douceur matinale du soleil d’octobre. "La microélectronique, c’est de plus en plus petit, de moins en moins cher, ça se diffuse partout et les composants ont une durée de vie de trois ans. C’est pourquoi, les choses évoluant très vite, cette formation devait être faite par une école généraliste comme l’est celle de Sant-Étienne. Nous allons développer une pédagogie qui stimule la créativité et rechercher une liaison avec l’industrie. Pourquoi s’installer ici ? Parce qu’on crée du mouvement en marchant. Il fallait passer le point de non-retour, sans attendre que les bâtiments neufs soient prêts. En 1991, quand j’étais à Nantes, j’avais installé des étudiants dans un bâtiment industriel qui avait servi au stockage des grains. Ici, vous êtes bien mieux lotis. Je vous remercie d’avoir accepté d’être des cobayes."
Le midi au Pesquier, le soir à la Baume les Aix
Les cobayes en question n’ont pas à se plaindre, et le reconnaissent bien volontiers. " Nous sommes hébergés à la Baume les Aix, raconte Cyrille Chavanne, étudiant. Ici, les conditions sont tout à fait correctes, on a du matériel neuf. Le midi, on prend les repas au collège du Pesquier. " L’objectif, pour les dirigeants de l’école des mines, c’est que ces pionniers racontent ce qu’ils ont vu à leur retour à Saint-Étienne. " Fin octobre, un autre groupe d’élèves de deuxième année viendra, et d’autres encore en janvier, explique Jori Leonardon, responsable de la scolarité. On aurait aimé recevoir des élèves de première année, dont certains seront là à la rentrée 2003, mais il y avait un problème de locaux. " Un moment envisagé, le centre de formation de la Sécurité civile à Valabre a finalement fait marche arrière. Pour François Agier, qui tient à louer le travail des services municipaux depuis le mois de mai dernier, le logement est d’ailleurs le seul point qui reste à régler. " Il va nous falloir quelque chose plus près de Gardanne que la Baume les Aix en attendant la construction du bâtiment qui accueillera sur place les étudiants en 2005. "
Si le coup d’envoi réel du Centre microélectronique de Provence sera donc donné en septembre 2003, une formation d’ingénieurs spécialisés aura lieu au printemps prochain. Mais dès maintenant, l’école des Mines doit mettre au point un contenu pédagogique et recruter des enseignants, puisque la formation d’ingénieurs en microélectronique n’existe pas pour l’instant. Pour les programmes, Robert Germinet est allé chercher à Gemplus Daniel Bois, ancien directeur du centre de recherche de France Telecom. " Cette école, c’est le chaînon manquant entre les entreprises de la vallée de l’Arc et le milieu étudiant. Il va y avoir de grosses opportunités dans les prochaines années en terme d’emplois. Il y a vingt ans, j’ai contribué au développement économique de la région grenobloise. La culture industrielle de Gardanne est un atout évident. " Le recrutement des enseignants s’avère plus épineux : " En France, il y a un problème, témoigne Jori Leonardon. Dans notre secteur, les carrières d’enseignant sont moins recherchées que les postes dans l’industrie. D’autant que dans cette dernière, les métiers existent déjà, et payent plutôt bien... "
Quelques minutes plus tard, dans la salle de la fresque signée en février dernier par Jules Marcolini, Roger Meï resitue le contexte à la vingtaine d’étudiants présents : " ici, des mineurs ont été formés pendant des années. Je suis très fier et très ému de vous voir dans cette salle : on est entré dans l’avenir. Il faut espérer que la microélectronique offrira des débouchés aux enfants de mineurs. Bienvenue à Gardanne. "