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La magie des orchestres à l’école Energies 354 - Loïc Taniou

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Deux cent vingt élèves qui jouent dans des orchestres créés dans des écoles élémentaires et des collèges du département se sont retrouvés fin mars à Gardanne pour un grand concert donné au Centre Microélectronique Charpak. Un moment magique musical et humain.

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Centre microélectronique Charpak

« C’est l’histoire d’un homme qui a une amoureuse, un travail, un toit mais qui se dit que ça doit être mieux ailleurs, alors il part dans la forêt, rentre dans une caverne et rencontre les trolls, » prévient François Le Gall, intervenant à la Médiathèque en introduction au morceau que les enfants réunis sur scène vont interpréter ce jeudi 31 mars lors d’un grand concert.

Pupitres, partitions, violons, clarinettes, trompettes, saxophones, trombones, contrebasses, guitares, percussions... c’est du haut niveau ce jour-là, voire de la haute voltige vu le nombre de musiciens et leur jeune âge. « Ceux qui sont sur les premiers temps lèvent la main... Non, pas toi tu es au violon. Eh, les accordéons on est pas à la plage ! » François Le Gall motive ses troupes très nombreuses ce jour-là et assure la direction de l’orchestre des enfants avec de grands gestes et des mouvements de la bouche pour accompagner les rythmes, les envolées musicales et les chansons. On dirait les mouvements d’un chef d’orchestre professionnel, mais en réalité il s’agit d’un langage et d’une gestuelle qu’il a lui-même créés pour diriger au mieux les enfants musiciens et leurs chorales.

Ce soir-là, deux cent vingt enfants sont réunis à l’initiative de la Médiathèque Nelson- Mandela, du Centre Microélectronique Georges-Charpak, de son club Muzik et de la Cité de la musique de Marseille. Il s’agit de la première rencontre départementale des orchestres à l’école réunissant ceux de Port de Bouc (collège Mistral), de Marseille (collège Versailles et école primaire Korsec), de Gardanne (la chorale orchestre J’enchante mon quartier de l’école Château-Pitty).

Ils vont se produire sur scène en jouant différents instruments à corde, à vent ou encore en interprétant des morceaux sur forme de chorales. Au programme : Seven Nations Army (The White Stripes), Versaille Blues, Malher, Water Music air n°3, La famille Adams, Je t’aime moi non plus et L’ami Caouette de Serge Gainsbourg, Quand j’enchante mon quartier de M’Kaci et F. Le Gall, L’homme qui plantait des arbres...

Ils se produiront à tour de rôle avant d’être réunis pour un grand final sur la scène dressée dans l’espace du Centre Microélectronique Georges-Charpak.

Si les enfants ont atteint un bon niveau de pratique musicale, c’est grâce à une initiative osée de certains enseignants volontaires, des intervenants d’écoles de musiques disponibles et d’établissements scolaires engagés.

Une alchimie toujours fragile mais qui porte ses fruits comme le confirment les deux responsables de l’inspection académique présents, Martial Soria et Annette Wiertlewski : « Les élèves qui composent les orchestres à l’école sont issus d’établissements situés en zone d’éducation prioritaire et souvent de quartiers défavorisés. C’est enrichissant pour les enfants au niveau culturel bien sûr, mais pas seulement car ils apprennent, à travers cette expérience, l’écoute, le respect et même la lecture. On peut dire que cette initiative d’orchestres à l’école est très originale et gratifiante. Il faut souligner l’implication des municipalités et du Conseil général qui sont des partenaires importants. »

Le projet d’orchestre est décliné sur trois ans. Généralement, des cours sont proposés durant le temps scolaire à raison d’une fois par semaine par instrument et dans les temps d’études entre 12h et 14h par exemple. Une fois par semaine, il y a répétition de l’orchestre. En dehors de l’apprentissage musical, les élèves vont même assister à des spectacles à l’opéra de Marseille ou au festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence. « Après cette expérience de trois années, nous incitons les enfants à poursuivre la pratique de la musique, souligne Yolaine Callier, coordinatrice à la Cité de la musique des projets d’orchestres développés dans les écoles de Marseille. On remarque chez ces enfants une plus grande capacité de concentration et de mémorisation. Cela déteint dans de nombreuses autres matières, même si cela n’est pas miraculeux. Ce qui est remarquable, c’est que les enfants se projettent différemment, n’ont plus de frein et deviennent ambitieux. L’orchestre c’est un lieu de vie et c’est un peu magique. »

Marianne Blayau, secrétaire générale de l’association nationale Orchestres à l’école, organisme qui participe financièrement à l’acquisition d’instruments de musiques dans les écoles, comme c’est le cas à Gardanne, a fait le déplacement sur la commune. « Nous essayons de favoriser le développement du dispositif sur l’ensemble du territoire. Bien sûr, il existe depuis longtemps des orchestres dans les écoles de manière plus ou moins formelle. Nous essayons de structurer et de formaliser un peu mieux les projets. On aime voir des initiatives comme celle d’aujourd’hui. D’habitude, on organise, là non. C’est bien que les différents orchestres du département se retrouvent pour échanger. »

Six-cent-vingt orchestres dans les écoles ont été répertoriés par l’association, réunissant dix-sept mille élèves. « On ne souhaite pas que cela soit trop cadré, qu’il n’y ait qu’une seule pédagogie, souligne la coordinatrice. Par exemple, l’orchestre de Gardanne est le seul qui possède des accordéons. Un autre orchestre joue des morceaux traditionnels tandis que d’autres élèves dansent avec eux des quadrilles. Il faut laisser les orchestres s’exprimer, mélanger les esthétiques que ce soit du jazz, de la musique traditionnelle, des chansons enfantines... Il faut juste qu’il y ait des partenaires comme une municipalité, des instruments, des intervenants de qualité et bien sûr que le projet soit porté par l’établissement scolaire. »