Soins palliatifs

Gardanne accueille La Maison Energies 42 - Christel Santacreux

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Après des mois d’efforts de la part des initiateurs du projet, le centre de soins pallatifs appelé La Maison accueile désormais ses premiers résidents. La nouvelle structure a été présentée aux Gardannais à l’occasion d’une réunion publique tenue fin septembre à la Maison du Peuple.

LA MAISON accueillera en permanence dix personnes atteintes de maladies graves et dont la pathologie est à un stade très avancé. Parmi ces dix personnes, huit seront atteintes du sida. Lors d’une réunion de présentation de la structure, organisée fin septembre, de nombreux Gardannais ont pris la parole. La plupart ont manifesté leur fierté de voir s’installer un tel projet dans la ville . La création du centre est en effet un événement dont les retentissements sont loin de se limiter à la périphérie de Gardanne.

Mais certains n’ont pas caché une certaine appréhension. En réponse à celle- ci, les maîtres d’æuvre du projet et le corps médical (les professeurs Gastaud, Blanc et le Dr Colmars) ont certifié que La Maison n’apporterait aucune nuisance à la population avoisinante. Le sida ne se transmet pas par simple contact (ou par les moustiques !) et toutes les garanties d’hygiène ont été prises. Par ailleurs, il n’y a pas de risque de voir se propager la toxicomanie alentour. Les sidéens ne sont pas forcément des toxicomanes, et quand bien même certains le seraient, leur état et leur traitement annule tout besoin de drogue.

Le projet est né d’une initiative privée qui a vu le jour grâce à de nombreuses aides. Le Conseil Régional PACA et le Conseil Général des Bouches du Rhône, la Fondation de France, l’émission télévisée Sidaction, des sponsors et deux récitals organisés par le Festival d’Aix-en-Provence (Tereza Berganza et James Bowman), ont permis de financer la création de La Maison. Le fonctionnement sera assuré grâce à une dotation annuelle de la DDASS. La municipalité de Gardanne n’a pas été sollicitée sur le plan financier. Par contre, elle s’est fait un devoir de soutenir le projet. Elle a notamment accordé rapidement toutes les autorisations nécessaires aux travaux de rénovation de l’ancienne clinique.

Roger Meï a en effet témoigné de son engagement dans ce projet : « la commune aborde les problèmes sociaux avec un grand souci d’aide et nous menons le combat pour plus de justice sociale et de solidarité ». II a souligné que Gardanne compte aujourd’hui une centaine de séropositifs. Aussi, il est difficile, pour chacun d’entre nous, de sentir loin de cette maladie qu’est le sida.

La Maison est née d’un constat : les structures hospitalières classiques ne sont pas adaptées au suivi des patients en phase palliative. Dans les hopitaux, le personnel est trop souvent débordé. Il ne peut offrir aux malades toute l’attention et la disponibilité nécessaire. La Maison a pour vocation d’apporter à ses résidents un soutien, aussi bien médical que psychologique ou social. Dans cette optique, différents professionnels - médecins, aides soignants, psychologue, assistante sociale, kinésitérapeute- interviendront en permanence. L’accompagnement se fera aussi au niveau de l’entourage du patient.

Ainsi, l’apport d’un équilibre physique et émotionnel, devrait pouvoir favoriser le retour à domicile du malade.

Dr Jean-Marc La Piana : "un lieu de ressourcement et d’échanges"

Energies a rencontré Jean-Marc La Piana, responsable de La Maison. Celui-ci a accepté de nous présenter la structure qu’il dirige.

Energies : Vous êtes, avec Chantal Bertheloot, l’initiateur du projet. Qu’est-ce-qui vous a pous- sé à le mettre en oeuvre ?

Docteur La Piana : Chantal Bertheloot est assistante sociale et s’occupait jusqu’à présent du maintien à domicile des patients atteints du sida. J’étais médecin généraliste jusqu’au mois de mai, date à laquelle j’ai stoppé mon activité pour me consacrer uniquement au projet. Cela fera bientôt dix ans que l’on s’occupe de sidéens et de séropositifs. Leurs diffcultés sont importantes, car elles sont à la fois physiques, morales, et du domaine des échanges avec l’entourage. Au bout d’un certin temps, on s’est dit que si l’on voulait vraiment que les choses avancent dans le domai- ne de la prise en charge des malades, il fallait créer un lieu où ces personnes puissent venir se ressourcer, un lieu où l’échange serait possible.

E : Cela a-t-il été difficile ?

Dr L.P : Aujourd’hui, cela fait plus d’un an que toute l’équipe de personnes qui travaille ici prépare le projet. Il y a eu des moments diffciles, très difficiles : il fallait trouver un lieu adapté, trouver les financements pour installer ce lieu, puis,pour le gérer. L’important, c’est d’avoir créé ensemble. On a tout nettoyé ensemble, on a peint ensemble, on a "galéré" ensemble. C’est une chose extraordinaire qui ne se produira plus jamais pour nous. Cela nous donne l’impression que cette maison est un endroit où l’on va vivre, et pas simple- ment dans lequel on va travailler. Tout cela n’est ni un sacrifice, ni un dévouement. On a la chance inouïe d’avoir créé notre travail ensemble, et c’est un travail dans lequel on a envie de se donner à fond, mais pas dans le sens charitable du terme.

E : Mais ce doit être diffcile pour un médecin de s’occuper de malades dont la guérison n’est plus possible ?

Dr L.P : Effectivement, ce qui est souvent dur, c’est d’accepter de ne pas toujours avoir le pouvoir de guérison. Je crois qu’il faut arriver à dépasser ça. II ne faut plus parler en notions de pouvoir ou de capacité, ces notions donnent au médecin une aura trop forte. Le rôle d’un médecin généraliste, c’est d’accompagner des gens dans la vie de tous les jours, dans les diffcultés qu’ils peuvent rencontrer.

E : Quels sont vos espoirs dans La Maison ?

Dr L.P : Ce qui est important pour nous, c’est que La Maison soit vraiment vue comme un lieu de vie, même si l’on a affaire à des gens qui sont à la fin de leur vie. Les gens sont vivants jusqu’à la dernière minute, et dans ces moments- là, il se passe beaucoup de choses. Cet te maison, c’est la dignité des malades avant tout, et il faut que cela serve ailleurs.