Logement

Expulsions locatives : des chiffres inquiétants Energies 314 - Bruno Colombari

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Si à Gardanne tout est fait pour éviter les expulsions, la montée de la précarité, notamment chez les salariés, se fait sentir depuis trois ans. La crise économique couplée au manque de logements pourrait avoir des conséquences graves.

La prévention des expulsions existe depuis dix ans. Les services sociaux, comme le CCAS à Gardanne, la CAF, les bailleurs sociaux, les huissiers et les juges travaillent ensemble pour essayer, dans la mesure du possible, de trouver des solutions pour que les locataires payent leurs loyers en retard et ainsi éviter l’expulsion.

« Plus tôt on est au courant d’une situation d’impayé, mieux on peut y répondre et se mobiliser. C’est un travail qui se fait tout au long de l’année, où on partage nos informations avec les bailleurs sociaux et les assistantes sociales de la CAF et du Conseil général, » explique Georges Felouzis, directeur du CCAS.

Au-delà de trois mois d’impayés, si la conciliation a échoué, la procédure d’expulsion commence. A ce moment- là, les familles sont convoquées au tribunal d’instance et le juge demande une enquête sociale.

« Il y a de nombreux cas possibles. Les plus nombreux sont les impayés de loyer, mais il y a aussi les troubles de voisinage ou encore les propriétaires qui veulent récupérer leur logement à la fin d’un bail. »

Le juge détermine alors si le locataire est de bonne foi ou pas. Il donne un délai au terme duquel soit la procédure s’arrête, soit l’expulsion est prononcée. La phase ultime est la demande du concours de la force publique.

En 2008 à Gardanne, 50 dossiers d’expulsions ont été établis, alors qu’il n’y en avait que 23 en 2006 et 38 en 2007. Pour la moitié d’entre eux, le concours de la force publique a été accordé, et deux expulsions ont été réalisées. Dix dossiers ont trouvé une solution avant d’en arriver là, et treize sont en cours.

« Ce qui est inquiétant, c’est que les années précédentes, les ménages concernés par ces procédures, de prévention ou d’expulsion, étaient en majorité déjà connus par les services sociaux. En 2008 ce n’est plus le cas : 45 sur 80 ne sont pas connus. Autrement dit, ce sont pour la plupart des salariés qui basculent dans la précarité.  »

Une donnée confirmée par une autre statistique, la montée continue des salariés (23 en 2006, 37 en 2008) et des retraités et pensionnés (8 en 2006, 19 en 2008). Les célibataires, veufs et divorcés sans enfant sont également en forte hausse : 19 en 2006, 36 en 2008).

Les effets de la crise se font-ils déjà sentir, alors que ces statistiques datent de l’année dernière ? « Pour l’instant, ce n’est pas flagrant, mais la part du logement dans les revenus des personnes précaires est très élevée, parfois jusqu’à 70%. Une perte d’emploi peut avoir des conséquences catastrophiques. Le travail précaire et partiel se généralise et les heures supplémentaires apportent du revenu, mais pas de droits. Et les annonces du gouvernement sont intenables : il faut savoir que les personnes expulsées sont relogées dans des foyers d’accueil, quand il y a de la place, ou dans des chambres d’hôtel. Ce ne sont pas des vrais logements. Il y a un mélange de discours qui se veut rassurant et de pratiques inquiétantes. »