Les chercheurs du CMP s’installent à Gardanne

Des jalons pour l'avenir Bruno Colombari

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Depuis septembre dernier, le Centre microélectronique de Provence accueille au Pesquier une dizaine de chercheurs et développe des partenariats avec les entreprises de Rousset et les universités.

Trente-deux mois avant l’ouverture des bâtiments de la route de Mimet, le Centre microélectronique de Provence a déjà démarré ses programmes de recherche. Une dizaine d’enseignants-chercheurs (sur les 75 que comptera l’école à terme) ont été recrutés l’été dernier, puisés dans le vivier universitaire mais aussi dans l’industrie. S’ils ne sont pas encore dans leurs murs, ils ont trouvé un refuge provisoire - et confortable - dans une grande villa du Pesquier issue du patrimoine immobilier des Houillères. C’est la SAFC qui la loue au Centre microélectronique. Elle abrite une dizaine de bureaux et une salle de réunion. « Mais ce n’est pas les murs qui comptent, c’est la dynamique intellectuelle, affirme Daniel Bois, directeur adjoint du CMP, chargé de la recherche. Il y a des manques entre la recherche académique et l’activité industrielle. C’est le chaînon faible de la recherche régionale. » Le CMP va donc concentrer ses efforts sur la science de la fabrication, pour utiliser des termes français, en développant plus particulièrement trois domaines : les plaquettes de silicium, l’électronique sur plastique, sur papier ou sur textile ou encore les systèmes de sécurité.

Les applications, même s’il faut les envisager sur une vingtaine d’années, sont prometteuses : l’alliance de la biologie et de la physique permettrait de créer des prothèses de rétine pour les non-voyants, une peau artificielle restituant fidèlement la chaleur et la pression ou encore des puces hautement sécurisées (voir encadré). Un partenariat a été conclu avec ST Microelectronics à Rousset. Les chercheurs du CMP travaillent là-bas, ainsi que sept thésards embauchés cette année qui se disperseront à Rousset, donc, mais aussi à Toulon, Marseille, Grenoble et Montpellier. Un chercheur partira en mars prochain pour un an à l’université de Columbia, aux États-Unis. « Avec eux, on peut dire que le CMP existe déjà en tant que centre de recherche, » ajoute Daniel Bois.

Un autre projet de grande ampleur est en cours avec ST Microelectronics, deux start-up (Impika et SPS) et l’équipementier Cybernetix : la recherche sur l’écriture et l’impression de matériaux électroniques. C’est le CREMSI (centre régional de microélectronique de silicium) qui doit évaluer la faisabilité du projet (en concurrence avec cinq autres). Le Conseil régional et le Conseil général subventionnent les projets retenus. Enfin, le CMP est également impliqué dans le CIM PACA (centre intégré de microélectronique), un ensemble d’équipements où la recherche académique et la recherche industrielle se rencontrent et travaillent ensemble. « Ce projet permettra à la recherche régionale de changer de vitesse, explique Daniel Bois. Et aussi de faire des économies de coût. » Trois sites se partageront le travail : Sophia Antipolis, Rousset et Gardanne. « Des financements sont demandés cette année auprès de l’État, la Région et le Département. Ils représentent 20 millions d’euros qui serviront à équiper la future salle blanche du CMP. »

Enfin, la présence du CMP devrait attirer des PME. Une start-up est déjà hébergée à Saint-Pierre depuis décembre, d’autres devraient suivre. L’objectif, à terme, c’est de créer un incubateur sur le thème de la sécurité des systèmes. « Là où il y a des compétences, il y a de l’activité, précise Christian Buatois, responsable d’une des trois équipes de recherche. Pourquoi des entreprises de haute technologie ne s’installeraient pas ici ? »

Chercheur en systèmes robustes

Jean-Baptiste Rigaud est l’un des dix chercheurs installés au Pesquier, dans l’annexe du CMP. Recruté en septembre dernier, il est titulaire d’un doctorat et d’une thèse sur la conception des circuits microélectroniques. Il est désormais maître-assistant pour le ministère de l’industrie. En septembre, il formera les élèves ingénieurs venus de Saint-Étienne. « Ce qui est intéressant, ici, c’est de construire la filière d’ingénieur civil des mines, de concevoir les programmes. Mon travail, c’est de concevoir des systèmes robustes. En clair, des systèmes capables de résister au piratage sur les cartes à puces, des décodeurs satellite, des cartes bancaires... » Pour cela, il doit se mettre à la place des hackers, ces pirates informatiques capables de venir à bout des systèmes les mieux protégés. « C’est un cycle sans fin, » avoue-t-il. Jean-Baptiste travaille avec ST Microelectronics à Rousset. « Travailler sur des lieux différents n’est pas un problème. Je n’ai pas besoin d’un labo, de toute façon. Mon labo, il est là, » dit-il en montrant son ordinateur portable. Résident provisoirement à Aix, il cherche un appartement à Gardanne où il a déjà ses repères. « Je suis inscrit à La Médiathèque, je connais aussi le cinéma, qui a une très bonne programmation et le marché. »