Ville de Gardanne
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Le massif du Montaiguet panse ses plaies
Après les incendies de l’été 2005 / Bruno Colombari
jeudi, 20 octobre 2005

Trois jours après une réunion publique avec l’ONF, les pompiers, l’écomusée et le lycée agricole, deux cents élèves ingénieurs des Arts et Métiers ont nettoyé une partie des espaces incendiés le 6 août dernier. Les travaux d’urgence vont commencer dans les prochains mois.

Ce premier dimanche d’octobre, le mistral qui balaie les hauteurs du Montaiguet est coupant comme une lame. Il a neigé sur les Alpes quelques heures plus tôt, et sans aucun doute, l’automne s’installe. Sur la crête qui marque la limite entre Aix et Gardanne, on mesure l’ampleur des dégâts. Cinquantehuit jours plus tôt, avec un mistral encore plus violent, cinq cents hectares sont partis en fumée de part et d’autre de cette barre rocheuse.

Ils sont venus en bleu de travail et en grosses chaussures, armés de scies et de haches. Ce sont les première et deuxième année de l’école des Arts et Métiers d’Aix. Comme chaque année, ils organisent une action bénévole de nettoyage et de défrichage des zones incendiées dans la région. « On a vu le feu depuis notre résidence d’étudiants, cet été, explique Nicolas Stratakis. C’était vraiment impressionnant. On s’est dit qu’on pourrait venir aider. » Une réunion préparatoire a été organisée le 22 septembre pour régler les questions de logistique (transport, assurances, outillage, nourriture) et pour déterminer là où il était judicieux d’agir.

Avec ses nombreux débris de bouteilles et ferrailles, la crête au-dessus du quartier Roman est toute indiquée, ainsi que le versant en face le Château de Barême. Pendant qu’un groupe s’éparpille sur la pente, un autre descend à Barême. Roger Meï les accueille, ainsi qu’Alain Bagnis, de la société de chasse qui a mis à disposition un ancien camion citerne. Stéphanie Olivero, du service environnement, et Gilles Campana, de l’association des Verts Terrils, supervisent les travaux. Une dizaine de riverains sont également là : certains se sont inscrits pour demander du renfort sur leur propriété, d’autres sont venus aider avec des tronçonneuses. Des petits groupes de trois ou quatre se forment et partent. L’ambiance est décontractée, mais le travail avance vite : avant la fin de la matinée, l’allée de platanes du château est entièrement nettoyée et débarrassée des lauriers calcinés. Les déchets sont ramassés dans des seaux et vidés dans de grandes poubelles noires. Un revolver calibre 45, tout rouillé, est retrouvé et remis à la gendarmerie. Sur la crête, Gilles Campana conseille les volontaires qui s’attaquent à la scie à de jeunes pins noircis : « Tenez compte de la pente et du sens du vent pour orienter la chute de l’arbre. Commencez par faire une entaille en forme de sourire, et ensuite attaquez-le de l’autre côté. Faites attention, au moment où il va tomber, il va sauter comme un ressort, ne restez pas trop près ! »

Une reconquête agricole des massifs

Trois jours plus tôt, dans la grande salle du 3 Casino copieusement garnie, Roger Meï avait invité l’état-major des pompiers, l’écomusée et son directeur Luc Langeron, l’ONF avec Christophe Herzog et le directeur du lycée agricole Michel Bourdais. « Nous allons créer un comité de suivi pour toute la durée de la réhabilitation des sites, » expliquait le maire, après avoir demandé à l’assistance de ne pas entrer dans des polémiques avec les pompiers. « Il y a des travaux d’urgence, notamment sur les terrains en pente, qu’il faudra faire dans le courant de l’hiver. La deuxième phase portera sur la réhabilitation proprement dite, à partir d’un diagnostic général. » Le colonel Luc Jorda (responsable de Service départemental d’incendie et de secours) affirmait que « la population s’accroît, les espaces forestiers aussi. Les anciennes cultures sont abandonnées, les paysages se ferment, la broussaille gagne du terrain. Dans 20 ou 30 ans, avec les besoins en logement qui ne vont faire qu’augmenter, les choses ne vont pas s’arranger. » Car, comme ajoutait Luc Langeron, “« Il va falloir de la mémoire, se souvenir de ces incendies. Des gens vont partir, d’autres vont arriver. Apprendre à vivre avec le feu, c’est savoir qu’il peut revenir. »

Pour l’Entente interdépartementale le colonel Bardot précisait : ‘« Amoyen et long terme, il faudra aménager des coupe-feux et des retardants. Mais ces espaces, il faut les entretenir, sinon ça ne sert à rien. D’où l’intérêt d’avoir des agriculteurs. » Sur ce point, Michel Bourdais remarquait « qu’il faut une reconquête agricole sur ces massifs, le sylvopastoralisme serait adapté. Et la zone est en AOC pour l’olivier. Nous sommes voisins, nous allons nous associer aux actions en cours. »

Parmi les questions posées par le public, la circulation des motos en forêt est souvent revenue. « Il y a eu trois orages énormes qui ont provoqué des coulées de boue et qui ont envahi la maison, explique Mme Estève, qui habite au quartier Roman. Et comme si ça ne suffisait pas, les motos viennent raviner le peu de terre qui reste. » Pour le CIQ Gardanne Ouest, Daniel Imbert remarquait : « quand on leur parle, ils écoutent, mais ils ne réalisent pas quels dégâts ils causent. Il faut un message éducatif clair. » Alain Bagnis ajoutait que les chasseurs étaient intervenus auprès des instances du département, sans succès. « Les intrusions se font par Luynes. On voit de tout dans ce massif, motos, quads... Il n’y a que le TGV qui ne passe pas. »

L’ONF est conscient du problème, mais « la seule solution, c’est des patrouilles de surveillance, qui ne sont pas simples à organiser. Il faudrait insister sur les sanctions encourues. » Les voici : pour un véhicule à moteur qui circule sur des chemins ou des routes dont l’accès est interdit, l’article LR301-3 du code forestier prévoit une amende de 135€. Hors des chemins et des routes, elle monte à 1 500€.

Les riverains ont également demandé des conseils, notamment sur la replantation de haies. « Évitez surtout les résineux, et faites des haies les plus basses possible, explique Christophe Herzog. Et surtout, mettez-les le plus loin possible de la maison. » Pour replanter des oliviers, qui coûtent relativement cher à l’achat, Luc Langeron préconise la technique du souquet. « Ce sont des éclats de souche que l’on replante, ça reprend généralement bien et c’est beaucoup moins cher. » Quant au problème posé par l’entreprise de recyclage de plastique B2 Test, installée à une centaine de mètres de l’Écomusée, Bernard Bastide, adjoint à l’environnement, précise que « ce n’était pas une installation classée, mais la DRIRE va intervenir sur le site. »