CMP : présentation du projet architectural

Voici le futur Centre Microélectronique de Provence Bruno Colombari

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Réuni le 4 juin dernier au centre Saint-Pierre à Biver, le jury de concours de maîtrise d’œuvre a fait son choix : c’est Aymeric Zublena, l’un des quatre architectes du stade de France, qui concevra le Centre microélectronique de Provence (CMP), à Château-Laurin. Les travaux commenceront en septembre 2004 et dureront deux ans. Le Prix Nobel de physique Georges Charpak, qui donnera son nom à la structure et qui faisait partie du jury, a été accueilli à Gardanne.

Mercredi 4 juin, 10h. Bloquée dans les embouteillages provoqués par une opération escargot à Marseille, la voiture de Robert Germinet et Georges Charpak arrive enfin devant la mairie. La réception en mairie, où l’attendent outre les élus, des responsables d’entreprises, et des personnalités locales, va être écourtée : dans quelques minutes, le jury qui choisira le cabinet d’architectes du futur Centre microélectronique de Provence (CMP) devant se réunir au centre Saint-Pierre. " Je voudrais vous dire tout l’honneur que vous nous faites, Monsieur Charpak, assurait Roger Meï en guise de bienvenue. Cette école d’ingénieurs est une chance pour Gardanne, alors que la mine a été fermée il y a quelques mois. De plus, le fait de donner votre nom à cette structure a quelque chose de symbolique : vous avez été ingénieur des mines, et vous êtes né en Pologne. A Gardanne, 90 % de la population a des origines étrangères, notamment polonaise. " Le Prix Nobel de physique 1992 répondait par une anecdote : " la vie est faite de hasards. En 1946, j’ai été naturalisé français. Il faut dire qu’à l’époque, il suffisait de le demander, le gouvernement français voulait en effet garder les Polonais qui envisageaient de rentrer au pays. J’ai fait des études d’ingénieur à l’École des Mines de Paris, même si mon souhait c’était plutôt de faire de l’électronique... Et je me retrouve ici, un temps infini après. La mine et l’électronique me rattrapent. Vous savez, ce sera difficile d’éliminer l’électronique de notre vie. Nous avons besoin, en France et en Europe, d’écoles comme celle-là, sinon on va se faire avaler par les Américains. "

Jean-Marc Giner, proviseur du lycée de l’Étoile, reprenant la suggestion du maire, glissait en passant : " j’espère que cette école rayonnera sur les autres établissements de la ville. " Quelques heures plus tard, le jury doit choisir entre les projets sélectionnés. Réunis dans les locaux du centre Saint-Pierre, où le CMP est installé jusqu’en 2006, les huit membres débattent toute la journée pour écarter deux projets et en retenir un. Outre Georges Charpak, on retrouve Roger Meï, Robert Germinet, directeur de l’École des Mines de Saint-Étienne, Michel Soustelle, directeur adjoint, Dominique Yani, secrétaire générale, Didier Lansiaux, ingénieur en chef des mines, Monique Reyre, conseillère en architecture à la DRAC PACA et André Jollivet, architecte. Le neuvième juré, Philippe-Charles Dubois, est resté bloqué à Paris en raison des grèves dans les transports aériens.

De Saint-Denis à Gardanne

En milieu d’après-midi, le verdict tombe : c’est le projet d’Aymeric Zublena, du cabinet parisien SCAU, qui a été désigné largement avec sept voix sur huit. Zublena, le nom vous dit sûrement quelque chose : c’est lui qui, avec Macary, Costantini et Regembal avait conçu le stade de France à Saint-Denis, inauguré en janvier 1998. Ravi d’avoir remporté ce concours (et de l’avoir remporté aussi largement), Aymeric Zublena nous confiait dès le lendemain : " dans tous les projets, on s’investit avec beaucoup d’énergie, avec le même enthousiasme, car chaque projet est différent. " L’architecte s’est entouré, pour concevoir son projet, d’un bureau d’étude technique avec un acousticien, un paysagiste, un économiste des lots architecturaux et six collaborateurs de son cabinet, la SCAU (société de conception, d’architecture et d’urbanisme). " Ces derniers mois, nous sommes venus sur place à Gardanne, nous avons arpenté le site, pris des photos. Les techniciens du bureau d’études y sont retournés plusieurs fois à ma demande. "

Pour l’emporter, Aymeric Zublena a dû composer avec un cahier des charges strict : le respect du site naturel de Château-Laurin, avec son parc, son bâtiment et le ruisseau qui le borde, l’hébergement des étudiants et des professeurs à proximité immédiate de l’École, les contraintes techniques (liaisons sans fil, locaux facilement modulables)... " La condition essentielle, c’était celle-là : s’adapter à l’évolution des besoins des utilisateurs. Il était aussi demandé de limiter la hauteur des bâtiments (quinze mètres maximum). Et bien entendu tenir compte de la présence de la départementale qui passe entre les deux ensembles de bâtiments. Plutôt qu’un giratoire, j’ai proposé de traiter ça comme une place, où l’espace piéton sera prioritaire. Il faudra voir avec la DDE comment réduire la vitesse des véhicules de part et d’autre de la place. "

Sur le choix des matériaux retenus, Aymeric Zublena est très clair : " c’est de l’architecture contemporaine, pas du pastiche. Les matériaux feront référence à l’environnement : de la pierre sèche pour les soubassements, des grandes baies vitrées, du bois pour les décorations intérieures, du cuivre verdit pour les toitures des bâtiments principaux. " Le concours remporté, le plus dur reste à faire : " il va falloir rencontrer la direction de l’École des mines pour intégrer les remarques du jury, " précise l’architecte, qui s’est rendu dès le 12 juin à Saint-Pierre pour une réunion de travail. " Ensuite, il faudra élaborer un avant-projet sommaire, puis un avant-projet détaillé, et enfin un projet d’exécution. Ça nous mènera à la fin du premier semestre 2004. "

Un outil pour fixer les entreprises dans le département

Lors de la conférence de presse qui suit la délibération du jury, Robert Germinet, le directeur de l’École des Mines de Saint-Étienne, donne des précisions sur le calendrier : les travaux devraient commencer en septembre 2004 et durer dix-huit mois pour la première tranche qui porte sur 43 millions d’euros, soit les deux-tiers de la surface bâtie totale. Normalement, le centre devrait donc ouvrir ses portes à Château-Laurin en septembre 2006. " Nous souhaitons que ce centre soit la référence européenne dans les pédagogies de l’innovation. C’est pour cela que nous lui avons donné le nom de Georges Charpak : c’est lui qui porte ça en Europe. " Pour le Conseil général, qui finance l’opération à hauteur de 11 millions d’euros, " ce centre est un outil idéal pour le développement des entreprises, et surtout pour les fixer durablement dans le département, " remarque Jean-Noël Guérini. Car, comme le précise ensuite Alain Hayot, vice-président du Conseil régional, " la stabilisation du potentiel industriel n’est pas acquise, il suffit de voir ce qui est arrivé à Gemplus. L’ouverture du CMP à Gardanne est hautement stratégique. De plus, cette ville a longtemps souffert de promesses non tenues. "

Reste maintenant à préparer la rentrée 2003, la première vraie rentrée à Gardanne pour le Centre microélectronique de Provence, qui accueillera dès septembre environ cent cinquante étudiants issus d’une première année tronc commun effectuée à Saint-Étienne. Quelle équipe pour les accueillir ? Dans quelles conditions seront-ils hébergés à Gardanne ? Quel sera le contenu de l’enseignement ? Comment le centre Saint-Pierre va-t-il fonctionner pendant les trois prochaines années ? Nous reviendrons sur tous ces points en septembre.