Culture

Un carnet rempli de bonnes notes Bruno Colombari

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D’Ennio Morricone à Henry Purcell en passant par la Marseillaise et Capitaine Flam, l’ensemble Odyssée a fait découvrir à 250 enfants le bonheur de la musique sur scène, avec des instruments pour de vrai.

Tendus, les six hommes en noir. Il faut dire que cet après-midi, sur la scène du 3 Casino, ils vont jouer pour la première fois en public Carnets de notes. Et histoire de corser les choses, c’est un public exclusivement composé d’élèves du CP au CM2 qui occupe à ras bord les 260 fauteuils. Serge Desautels a beau dire, après coup : « le jeune public, on a l’habitude, on sait gérer », il n’empêche que ce n’est pas simple. Ils ont une heure pour convaincre, pour plaire et pour charmer à grands coups de cor, de trombone, de trompettes et de tuba. Sur la musique du Clan des Siciliens, ils interpellent : « Gino ! Gepetto ! Pinocchio ! » Le ton est donné, les enfants démarrent au quart de tour.

On franchit allègrement les époques et les styles, du baroque d’Henry Purcell (Marche pour les funérailles de la reine, 1694) au Popcorn de Hot Butter (1972). Puis arrive une Marseillaise figée (reprise en chœur par les enfants), qui dérape soudain sur « On est les champions » et plonge la salle dans une ambiance Stade de France. Dans la foulée, la 7ème symphonie de Beethoven (1813) est accompagnée en rythme par des battements de mains. Sur scène, le spectacle est permanent : deux musiciens jouent d’une seule trompette les yeux fermés, des flammes s’échappent des baguettes du batteur, et une batte de base-ball de trois mètres de long est lentement extraite du pavillon d’un tuba, dans le plus pur style Tex Avery.

L’immense cor des Alpes, près de quatre mètres, fait son apparition pour interpréter le dialogue musical avec les extra-terrestres dans Rencontres du troisième type. Un peu plus tard, le même instrument, manié par Serge Desautels, servira à redonner vie à Oxygène, de Jean-Michel Jarre, dans une mise en scène stupéfiante : le grand cor s’élève lentement et tourne, de plus en plus vite, comme une fronde démesurée. Ce n’est qu’à l’issue du spectacle, en répondant aux questions des enfants, que Serge dévoilera le mystère : « le cor est en fibre de carbone, il est très léger, sinon je ne pourrais jamais tourner en le tenant à bout de bras... »

Les petits veulent tout savoir : « Combien de temps avez-vous préparé le spectacle ? » « Environ six mois, deux fois par jour. C’est comme quand vous apprenez une poésie par cœur, au début vous hésitez, à la fin ça vient tout seul ». « Comment vous faites pour faire sortir la fumée ? » « Monsieur, j’ai reconnu Mission Impossible ! » Pour le batteur Denis Martins, « avec le jeune public, notre jeu de scène est différent. Ça nous permet aussi de rôder le spectacle, de voir là où ça réagit. » Serge Desautels confirme : « Les enfants entendent de la musique toute la journée, à la radio, à la télé. Mais ils connaissent mal les instruments, il ne savent pas les nommer. On fait aussi des journées d’initiation pour qu’ils touchent les instruments, qu’ils comprennent comment ça marche. » Au pied de la scène, une petite fille interpelle le musicien : « Monsieur, c’était trop bien ! »