Conflit social à la SNET

Régime minceur pour la centrale Bruno Colombari

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Rude mois de septembre à la centrale thermique. Le licenciement de vingt salariés sous-traitants, fin août, a mis le feu aux poudres. La SNET, qui gère le site, annonce parallèlement 327 suppressions d’emplois sur toute la France, dont 80 à Gardanne.

Le monde de l’entreprise fonctionne souvent par antiphrases. Ainsi, quand la SNET (filiale de Charbonnages de France) annonce un projet de réorganisation interne baptisé Grandir, il faut comprendre réduction des coûts (60 millions d’euros d’ici 2004) et compression des effectifs. De 1 086 salariés (des mineurs recasés dans les centrales thermiques et du personnel des Industries électriques et gazières) l’été dernier, on devrait chuter à 759 dans un peu plus d’un an. C’est la centrale Émile-Huchet de Carling (Moselle) qui en fera particulièrement les frais (222 suppressions d’emplois), mais celle de Gardanne devrait également perdre 80 personnes. Pourquoi un tel régime minceur ? Pour le comprendre, un point d’histoire est nécessaire. La SNET (société nationale d’électricité et de thermique) est créée le 1er janvier 1995 pour gérer le pôle électricité de Charbonnages de France, avec neuf centrales dans toute la France. Au départ, son capital était réparti entre Charbonnages de France (81 %) et EDF (19 %). En novembre 2000, un troisième larron entre dans la danse : il s’agit de l’électricien espagnol Endesa. Avec 30 %, ce dernier n’est pas majoritaire mais aspire évidemment à le devenir : dans ce milieu, la philanthropie (sans parler de l’intérêt général) n’est pas de mise : il est important pour une entreprise privatisable de présenter les comptes les plus "attractifs" possibles...

Pour réduire les coûts, le moyen le plus pratique est de se débarrasser des sous-traitants. C’est ce qui s’est passé à Gardanne, avec l’annonce, fin août, du licenciement de vingt salariés des entreprises SOTRASI et MTIM, chargées de la maintenance de la machinerie. « Ces tâches étaient sous-traitées depuis vingt ans, explique Serge Coutouris, délégué CGT à la centrale. Maintenant, elles seront réintégrées. Les sous-traitants, c’est la première étape. La deuxième sera les détachés mineurs, et après ce sera le tour des IEG (salariés des industries électriques et gazières). » Il aura fallu près d’un mois de conflit, avec occupation successive des groupes IV et V par les grévistes, pour qu’un accord qualifié d’honorable soit trouvé concernant les vingt salariés licenciés : un plan social comprenant des indemnités correspondant à quatre ans de salaire, des aides à la formation et à la reconversion, pris en charge par CDF, la SNET et les entreprises sous traitantes a été négocié. Pas d’avancée en revanche sur les réductions d’emploi à la SNET : le plan Grandir est toujours d’actualité.

Autre sujet d’inquiétude, l’arrêt des investissements. Du moins, en France, car à l’étranger, que ce soit en Pologne, en Turquie ou en Espagne, la SNET n’hésite pas à mettre la main à la poche. « On redoute un plan social à grande échelle en France, s’inquiète Serge Coutouris. Les effectifs sont en baisse et il n’y a plus d’investissement. » Le groupe VI de 375 mégawatts, promis par le gouvernement en 1999, en est encore au Plan pluriannuel d’investissements (PPI). L’appel d’offres, préalable au lancement du chantier, n’est toujours pas lancé. D’autre part, il y a l’échéance de 2006, avec la désulfuration de la cheminée du groupe V, construite en 1980 et qui ne sera bientôt plus aux normes de dépollution. A ce propos, l’hebdomadaire l’Usine nouvelle annonçait le lancement d’un appel d’offres en novembre pour une unité de désulfuration-dénitrification pour le groupe V (100 millions d’euros). Contactées à plusieurs reprises par notre rédaction, les directions de la SNET et de la centrale thermique n’ont pas donné suite à nos questions. Le jeudi 3 octobre, les salariés de la SNET participeront à la grande journée d’action pour la défense du service public. Sachant ce qui les attend, parions que ce ne ne seront pas les moins déterminés.