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Parce que la culture, ça s’apprend Energies 403 - Jeremy Noé

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Derrière Orchestres à l’école dont la saison 2013-2014 a commencé en fanfare, d’autres initiatives illustrent un effort particulier pour démocratiser la culture auprès des jeunes. Un livret d’apprentissage du spectacle vivant est diffusé dès ce mois-ci auprès des CE1.

L’IMAGE DONNE LE SOURIRE. Salle polyvalente de l’école Château-Pitty, à 11h en ce début d’octobre. Pour cette première d’Orchestres à l’école 2013- 2014, les parents montrent l’exemple, et jouent devant leurs petits. C’est un petit capharnaüm de cuivres, de cordes, d’instruments à vent, plus ou moins fidèle à La reine de la nuit, un extrait de La flûte enchantée. Pour être honnête, le résultat est on ne peut plus maladroit... mais ce n’est pas ça le plus important. Et d’une, ces parents n’ont eu qu’une heure (!) pour répéter. Et de l’autre, l’intérêt est ailleurs.

A la sortie, tandis que les enfants vont chercher l’instrument qui leur sera confié pendant un an (jusqu’au concert final, en juin) le discours des parents est unanime : « C’est super génial, glisse Nathalie, maman d’Émilie, 9 ans. Ma fille est tombée dedans, elle joue de l’accordéon pour Orchestres à l’école... et du piano à l’école de musique. » Aminata, maman de Steven, désormais joueur de trombone, sourit : « Je vois vraiment les résultats sur son attention, sa mémoire et son écoute au niveau des devoirs. Depuis qu’il joue d’un instrument à l’école, il a beaucoup progressé, car il était très agité avant. Et en plus, il aime ça ! » Quant à Laurent, qui, comme son petit Dorian, 10 ans, porte une crête et un maillot de foot, il raconte : « Je sais que le dispositif aide à apaiser les enfants en classe, et il est porté par des instituteurs super. Dorian se régale, on le voit heureux comme tout, et il a fait des progrès phénoménaux. D’ailleurs il a décidé d’intégrer les cours de l’école de musique. »

IL Y A DONC Orchestres à l’école à Château- Pitty (classes du CE2 au CM2, plus une Clis de l’école Bayet), mais pas que. « La culture à Gardanne s’accompagne aussi indissociablement d’une réflexion et d’une action sur les pratiques, » défend Mustapha El Miri, élu à la culture. Par “pratique,” il faut entendre la partie immergée de l’iceberg : la médiation culturelle au sein de l’école de musique et l’école d’arts plastiques municipales, puis Danse à l’école, Opéra à l’école... et bientôt Sciences à l’école, développés autour de nombreux partenariats artistiques et humains.

« Nous pourrions nous contenter de programmer des spectacles, et de dire aux Gardannais : Venez, passez à la caisse, merci au revoir, lance Lawrence Caudie, directeur du service Culturel. C’est le choix de la ville de travailler sur la médiation selon une double approches : l’une en direction de nos partenaires (profs, artistes) pour développer une animation, ou une expo, ou tout autre rencontre pédagogique autour d’un événement culturel. L’autre en direct du spectateur et surtout des enfants : comment lui faire découvrir, avant une sortie, le monde du spectacle vivant. Ceci pour éviter la simple consommation de spectacle et favoriser une sorte de formation, d’apprentissage.  »

DERNIÈRE ILLUSTRATION EN DATE, la création, d’un livret à destination des écoliers de primaire, chapeauté par Émilie Halley, médiatrice culturelle. « A une dame qui lui disait qu’elle ne comprenait pas son art, Picasso à répondu : Mais est-ce que vous savez parler chinois madame ? L’art c’est pareil que le chinois, ça s’apprend. On ne naît pas spectateur, on le devient, » explique Émilie.

A la lisière de la programmation culturelle, elle sillonne les écoles, anime des ateliers à destination des enfants, avec sous le bras des maquettes de la salle 1 du 3 Casino (pour expliquer ce qu’est la scénographie) de théâtre d’ombre chinoises, ou une bande dessinée pour comprendre les sorties culturelles (à destination des maternelles).

Et avec les artistes, aussi, qui se transforment ainsi en VRP de leurs propres oeuvres. « Quand on allume sa télé, à part le journal qui nous donne le programme, on n’a rien pour nous expliquer ce qui se passe. Là, on se donne les moyens d’en parler ensemble, avant et après, de partager ce qu’on en pense...  » souligne Lawrence. En somme, si tu ne viens pas à la culture, la culture viendra à toi !

Mon journal des spectacles

En cours de déploiement dans les écoles de Gardanne, dès le CE1, Mon journal des spectacles est une sorte de cahier de vacances... à remplir toute l’année, au rythme des sorties. Il mélange jeux (coloriages, mots croisés...) et cours d’histoire lights autour du théâtre vivant, de ses us et coutumes. Non sans humour, comme en témoigne son vocabulaire. « Comédiens : être humains très sensibles, à traiter avec applaudissements. »

« L’outil est né dans la démarche de l’École du spectateur, explique Émilie Halley, médiatrice au service Culturel. Il y a eu déjà un certain nombre d’outils, comme une bande dessinée sur les sorties culturelles pour aider les tout petits à comprendre leurs sorties au théâtre, une maquette du cinéma 3 casino... Je m’inspire de ce qui se fait ailleurs, bien sûr. Dès qu’il y a une grosse structure de spectacles qui ouvre, il y a toujours un service des relations publiques et une personne chargée de la médiation avec les jeunes publics. Par exemple, quand avec Écoles en scène on est allés au Grand théâtre de Provence à Aix, les enfants avaient un petit livret, des fiches de jeu sur chaque spectacle. Ça m’a donné envie de créer un outil spécifique Gardannais, qui parle du territoire (il y a des photos des lieux culturels de la ville) et qui donne des outils sur la culture. Avec la volonté que le carnet suive l’enfant sur plusieurs années. »

Mon journal des spectacles peut en effet suivre l’enfant du CE1 au CM2. Une page est même réservée pour recueillir les autographes des comédiens  !