Début 1981, alors que le septennat de Giscard d’Estaing vivait ses dernières semaines, un centre de santé mutualiste, un seul, ouvrait ses portes. Ça se passait à Gardanne, au terme de plusieurs années de lutte acharnée pour l’accès aux soins à tous dans les meilleures conditions. Le 22 mars dernier, les Mutuelles de Provence ont fêté le 25e anniversaire d’une structure dont l’avenir est menacé, faute d’un engagement de l’État. « Le nouveau code de la mutualité ne permet pas au centre de santé de bénéficier des cotisations des mutualistes, alors que nous sommes engagés dans des investissements lourds en terme de matériel médical. Sans financements publics, nous pourrions être amenés à fermer les centres de santé, » explique Nicole Allais, présidente des Mutuelles de Provence.
Cent mille pétitions ont été remises en Préfecture en décembre dernier, demandant que les centres de santé, ouverts à tous, bénéficient de financements publics. « Nos difficultés financières ne viennent pas d’un manque de patients, ajoute Catherine Roncin, médecin- directeur du centre de santé. Mais on fait le travail à la place de la sécurité sociale, avec le tiers payant, sans être rémunéré pour ça, ce qui représente déjà 4 euros par patient accueilli au centre. Nous n’avons pas eu d’aide pour l’informatisation. Enfin, il est de plus en plus difficile de trouver des spécialistes qui acceptent de travailler en secteur 1 (au tarif de la Sécurité sociale, NdlR). »
D’où la nécessité d’un financement public, pris en charge par l’État dans le cadre de la politique de la Ville, rebaptisée à l’automne dernier Contrat Urbain de Cohésion Sociale (CUCS). « On attend toujours, remarque Nicole Allais. On craint que ce ne soit encore qu’une vague promesse faite dans l’urgence de la crise des banlieues. » L’État s’était engagé à associer les maires, les départements et les régions pour financer des actions de santé publique en partenariat avec la Mutualité. Le ministère de la cohésion sociale annonce pour sa part le lancement des Contrats urbains pour le 1er janvier 2007, juste avant les présidentielles...
Roger Meï rappelait pour sa part que François Billoux, qui a donné son nom au centre, fut à la Libération l’un de ceux qui ont mis en place le système français de protection sociale. « Aujourd’hui, le cheminement est inverse, la politique sociale est au service des grands groupes. Dans l’Europe libérale, les Mutuelles sont les empêcheurs de tourner en rond, car la santé est un marché très important. » Raison de plus pour défendre le principe d’un accès pour tous à des soins de qualité.