Fermeture de la mine

Les mystères des profondeurs Bruno Colombari

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Précipitation, conflit avec le personnel, interdiction d’accéder au fond, manque de transparence... L’arrêt de l’extraction charbonnnière se passe mal. Les collectivités locales et les associations tentent d’y voir plus clair.

Que vont devenir les installations minières ? Où en est le projet d’ennoyage ? Qui peut accéder au fond ? C’est pour faire un point sur ces questions que le comité de vigilance, composé d’élus du bassin minier et d’associations, s’est réuni en mairie le 13 mars dernier, dix jours après que le Préfet ait reçu les maires en présence de la DRIRE et de la direction des Houillères. Tout laisse à penser que la précipitation dans laquelle s’est déroulé l’arrêt de l’extraction masque mal une volonté, au niveau de l’État, de mettre tout le monde devant le fait accompli et de rendre le processus irréversible. « Il y a nécessité d’une contre-expertise sur la question de l’ennoyage, souligne Roger Meï. La Préfecture nous permet de consulter le dossier d’arrêt de l’exploitation, mais c’est une pile de documents techniques de 1,10 mètre de haut. Nous allons faire appel à un bureau d’études spécialisé pour y voir plus clair. » Il y en a bien besoin, tant la procédure de fermeture est opaque.

« Le CHSCT (comité hygiène et sécurité) a nommé un expert indépendant, annonce Guy Bonnet, délégué CGT à la mine. Les Houillères lui ont interdit l’accès au fond. » Et si des experts internationaux veulent voir, ils ne pourront se baser que sur les rapports existants réalisés par le cabinet CESAME pour l’hygrométrie, et INERIS pour la sécurité. Or, selon les mineurs, il resterait au fond des choses pas très catholiques : des huiles lourdes, les gaz des contacteurs électriques, et surtout une vingtaine de fûts venus de la centrale stockés au fond il y a une dizaine d’années : « on ne sait pas ce qu’il y a dedans, mais ça pourrait bien être du pyralène, supposent les délégués CGT, puisqu’à cette époque les transformateurs ont été démontés à la centrale thermique. Ils ont été déposés derrières des barrages remplis de bétonite, par des mineurs qui devaient porter des gants et un masque. » Une accusation grave qu’il sera difficile de vérifier si le fond n’est plus accessible... Le colmatage des puits inquiète également les mineurs, qui craignent des remontées de grisou dans des points hauts, comme à Valdonne ou Peypin. « Dans le Nord, c’est déjà arrivé, le gaz est remonté dans des caves. »

Enfin, dernière question, celle du patrimoine minier. Les terrils (trois à Gardanne : Les Sauvaires, les Molx et Saint-Pierre) devront rester sous surveillance. Les bâtiments spécifiquement miniers (chevalements, lavoirs) devraient être démolis, bien que les HBCM aient proposé à Gardanne de récupérer le puits Z, au Payannet. Enfin, reste la question du puits Morandat, le plus récent des carreaux du bassin, mis en service en 1989 : il représente 14 ha de terrain, 4 200 m2 de bâtiments industriels et 3 100 m2 de bureaux. La Ville souhaiterait l’acquérir pour un prix symbolique, en dédommagement des préjudices subis par la fermeture anticipée. Mais pour les Houillères, un sou est un sou : la vente devrait se faire au prix des Domaines. A l’issue de la réunion, les associations présentes ont demandé que le Préfet les reçoivent rapidement, et ont exigé plus de transparence dans les discussions en cours. Une délégation du comité de vigilance va d’autre part demander à accéder au fond.

Les conséquences de l’ennoyage selon les Houillères

Entre les trois options (garder le puits Y à sec, tout noyer ou garder la galerie à la mer), les HBCM préconisent la dernière. Dans le dossier d’arrêt définitif remis en Préfecture le 3 mars dernier, un calendrier est proposé : la montée des eaux durerait quatre à cinq ans, le temps que celles-ci atteignent la galerie de la mer, sous le puits Biver. D’ici là, annonce l’exploitant, peu de conséquences sur la qualité de l’eau rejetée à la Madrague et aucun effet sur la stabilité des sols. En revanche, le plan d’eau de Fontvenelle n’est plus alimenté par les eaux de la mine. Dans un second temps, le système se stabilise. La galerie de la mer sert de surverse. « Les eaux de première surverse, relativement riches en fer et sulfates, pourraient entraîner une pollution uniquement visuelle. » De plus, « ce phénomène transitoire s’atténue rapidement et disparaît complètement après quelques années. » Tout dépendra en fait de la qualité des travaux réalisés au fond, et notamment de l’enlèvement des produits toxiques qui s’y trouvent. Sur ce point, les informations apportées par les mineurs sont plus inquiétantes que ce scénario idéal.