Environnement

Les communes face à l'après-mine Claude Durand

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Les communes membres de l’Association des Communes Minières de France (ACOM) se sont réunies à Pau pour faire le point sur leur situation après la fermeture des bassins miniers. Des situations contrastées selon les formes d’exploitations et la nature du minerai exploité (charbon, fer, potasse, uranium), avec pour toutes le même vécu d’un État qui cherche à se désengager au plus vite.

René Bourgeois est maire de Varangéville, une bourgade de Meurthe-et- Moselle où l’on a exploité depuis 1856 des mines de sel à 160 m de profondeur, selon la technique des piliers (on n’exploite qu’une partie du gisement le reste - 25% en l’occcurance - servant de piliers). L’exploitation s’est déplacée sur une commune voisine, mais en 2002 le maire et la population ont appris que tout le territoire de la commune était considéré à risque par l’État et à ce titre inconstructible. Les Salins du Midi, exploitant en activité ne fait aucune proposition pour consolider le site.

Philippe Brun est maire de Susville, commune de l’Isère de 1500 habitants. Dans sa commune les HBCM ont exploité le charbon, géré une centrale qui ensuite a été désaffectée, laissant à la commune une friche industrielle et un sol gravement pollué. Depuis la ville se bat contre Charbonnages de France et l’État pour obtenir la dépollution du site.

Deux exemples parmi beaucoup d’autres qui ont illustré lors des Assises de l’Acom les difficultés auxquelles sont confrontées les villes lorsqu’elles récupèrent un patrimoine minier. Difficultés accrues par la petite taille de ces communes et parfois leur isolement. Seul le regroupement en association nationale leur permet de se faire entendre.

PLU-PPR-PPRM Quel avenir dans le maquis des sigles ?

Si Gardanne n’est pas confrontée à de telles situations, la problématique est pourtant similaire et mérite vigilance. Ainsi, Roger Meï a-t-il soulevé lors de ces rencontres la question de l’information des élus et des populations concernés.

Ainsi, dans notre commune est engagée l’élaboration d’un Plan Local d’Urbanisme (PLU) en concertation avec la population qui aura pour vocation de fixer les grands axes de son développement pour les vingt ans à venir.

Or, le Préfet devrait diligenter un Plan de Prévention des Risques Miniers (PPRM) qui s’imposera au PLU et n’aura fait l’objet d’aucune expertise contradictoire. Il sera élaboré par les services de l’État, dont la compétence n’est pas en cause mais qui sont juge et partie dans cette affaire. Lors de l’arrêt de l’exploitation de la mine, le Conseil municipal de Gardanne, avec l’appui de l’Acom, avait commandé une étude contradictoire qui avait pointé un certain nombre d’incertitudes : sur le pistonnage du grisou par la montée de l’eau, sur la fragilisation des zones d’exploitations anciennes peu profondes, sur les risques d’incendie au fond... autant de remarques balayées d’un revers de main.

Roger Meï a saisi le Préfet pour qu’il engage l’élaboration du PPRM, sans suite à ce jour. C’est que la particularité du PPRM par rapport au Plan de Prévention des Risques (PPR) est qu’il désigne un responsable, à savoir l’exploitant (ou l’État dans le cas de CDF) qui doit assumer les mesures de préventions ou de réparations : des millions d’euros sont alors en jeu comme à Varangéville ou à Susville.

Une liquidation qui se voulait discrète

Parce qu’ils avaient été alertés par l’Acom, les parlementaires avaient décidé la mise en place d’une Agence de Prévention et de Surveillance des Risques Miniers. Le gouvernement s’y était résolu de mauvaise grâce, ne souhaitant pas que les élus des bassins miniers soient associés à la réflexion sur l’aprèsmine. Décidée à l’unanimité au Sénat comme à l’Assemblée nationale, cette structure n’a jamais été dotée des moyens nécessaires à son fonctionnement. Malgré les engagements du ministre de l’industrie François Loos aux communes minières le 5 janvier 2006, le gouvernement la liquide en supprimant totalement ses crédits dans la loi de finance 2007. Les maires réunis à Pau ont dénoncé cette attitude méprisante tant vis à vis des parlementaires que des élus locaux.

Le BRGM un outil de prévention

En accueillant sur le site du carreau de Morandat le Bureau de Recherches Géologiques et Minières la ville de Gardanne entend contribuer à son niveau au développement du suivi de l’après-mine. Ses missions concerneront la prévention et la surveillance des anciennes concessions, la réalisation de travaux techniques et administratifs en remplacement de l’exploitant, les interventions en cas de sinistres miniers, la gestion des installations restant à la charge de l’État, et enfin la fourniture de renseignements sur ces éléments.

Bien que prenant en compte le sérieux du BRGM, plusieurs élus ont tenu à faire part de leur inquiétude dès lors que le BRGM établirait le diagnostic et serait aussi chargé de la mise en œuvre des moyens. Une inquiétude accrue pour les communes où l’exploitant était privé, comme pour les mines d’or de Salsigne par exemple.

Des incertitudes sur les droits des mineurs

Si la prévention et la gestion des risques étaient l’ordre du jour principal de ces rencontres, elles furent aussi l’occasion de faire le point sur l’ensemble des dossiers. Le président de l’Acom a tenu, entre autre, à faire part du mécontentement de l’association quant au fonctionnement de l’Agence Nationale pour la Garantie des Droits des Mineurs « dont la gestion se caractérise non seulement par des dysfonctionnements sérieux mais aussi par une remise en question des droits de la corporation minière dont certains droits locaux et usuels... Si la rigueur du statut juridique de l’ANGDM est une réelle contrainte elle ne peut à elle seule justifier les problèmes rencontrés [...] et sa gestion ignore les engagements de l’État et les annonces gouvernementales faites lors de sa création » et il déplorait le peu d’intérêt de certains élus membres de l’ANGDM pour la corporation minière. Une agence où le bassin de Provence n’est plus représenté.

Jean-Pierre Kucheida* : « un retour en arrière »

- Comment appréciez-vous la suppression par le gouvernement de l’APSRM (Agence de Prévention et de Surveillance des Risques Miniers) ?

- Je déplore profondément l’intention du Ministère de l’Industrie de supprimer l’Agence dans le cadre de la prochaine loi de finances. C’est un retour en arrière par rapport à la loi de 1999 qui a réformé le Code Minier. En effet, c’est la première fois qu’une loi prenait véritablement en compte les nombreux problèmes techniques que pose l’arrêt des travaux miniers pour les communes. Avec la création de l’Agence, cette loi organisait aussi l’indispensable concertation entre l’Etat, les exploitants et les élus locaux sur les questions d’après-mine. L’annonce de cette suppression par le Gouvernement est également très choquante car la loi de 1999 fut votée à l’unanimité par le Sénat et l’Assemblée Nationale. C’est une véritable remise en cause du rôle du Parlement par le Gouvernement. Or, le Parlement joue un rôle important pour notre démocratie.

- Quelles sont les propositions de l’ACOM à ce sujet ?

- L’association, forte de sa représentativité de l’ensemble des bassins miniers du Pays, interviendra auprès du Gouvernement pour demander un arbitrage sur cette question. Par ailleurs, l’objectif est aussi que cette agence soit dotée des moyens suffisants pour assurer ses missions de gestion des risques miniers en prenant en compte les problèmes des communes minières.

* Jean-Pierre Kucheida est député-maire de Liévin et président d’ACOM France