Tourisme

Le paradoxe gardannais Energies 394 - Jeremy Noé

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L’Office de Tourisme lance un nouveau parcours touristique pour découvrir Gardanne côté nature et multiplie les projets. Objectif : entre la Saint-Victoire et les panaches de fumées industrielles, s’affirmer comme une terre touristique à part entière. Un changement ? Non, Sire, une révolution !

« IL Y A À GARDANNE UN PARADOXE, » explique Fanny Nadeau, nouvelle jeune responsable de l’Office de Tourisme. « C’est cette vue qu’on a du cimetière des amandiers à Valabre, où on peut voir la cheminée de la centrale thermique et la Sainte-Victoire. Nature et usine, ces deux choses ne peuvent pas vivre l’une sans l’autre, et font partie intégrante de l’identité gardannaise. »

Et donc de son attrait touristique, au point que l’Office, capitalisant sur les 45 % d’espace boisé sur la commune, et huit sentiers de randonnée, a donné un grand coup de barre vers le tourisme vert. Projet phare en 2013 : le lancement du parcours Terre et Terroir, où il s’agit de partir à la rencontre d’une Gardanne belle et insolite, sur une terre préservée, et en compagnie de ceux qui la font. Arrivé trop tard pour être labellisé MP 2013, Terre et Terroir peut néanmoins se voir comme le pendant “off” du GR 2013, le sentier d’artistes inauguré le mois dernier.

LE CIRCUIT PREND SON DÉPART à la Tuilerie Bossy, à la carte soit pour la demi-journée soit pour la journée complète. Première étape : le Pavillon du Roy René. En chemin, on passe le long de la Luynes, et “la petite Sibérie,” un point où il peut faire jusqu’à - 13° l’hiver. On parle du hameau de Luynes et de l’origine de son nom, on apprend que la rivière coupe trois fois le chemin de fer entre Gardanne et Aix.

On aperçoit le mur de Gueydan, aussi, sur le Montaiguet, “Mont de l’eau,” dit aussi la “colline des Aixois,” longue de 6km. Fanny conte « l’histoire d’amour très forte entre le champignon et l’algue, c’est le lychen. Il y en a beaucoup à Gardanne, ça veut dire que l’air est de bonne qualité, » mais laisse tomber tout romantisme au Pavillon de chasse du Roi René pour asséner un lapidaire : « Vu les dates de construction de la bâtisse, le roi n’y a très probablement jamais mis les pieds. »

Arrive le milieu de matinée, on a ouï, stupéfait, le lien entre Valabre et Matisse (ne comptez pas sur nous pour le dévoiler, il faudra faire le circuit). Au cimetière des amandiers du domaine de La Féraude, on fait une pause Land art, avec des oeuvres en pleine nature exposées par les artisans de la Tuilerie Bossy. « Dans le Land art, la nature ne sert plus de modèle, elle est l’objet de l’oeuvre, » explique Fanny devant des cailloux de marbre blanc artistiquement disposés pour former “l’énergie vitale, le cycle de la vie.”

Un peu plus loin, on croise des dizaines de papillons blanc disposés sur un arbre. Des gouttes multicolores suspendues dans des buissons, et des oiseaux en raku. Et puis c’est l’heure de la dégustation de jus de fruits et vins au domaine de La Féraude. « Alors on sait très bien que ce n’est pas un vin à millésime, explique Fanny à l’intérieur de la maison d’hôtes. Mais il est fait par les élèves du lycée agricole. C’est ça qui fait sa vraie richesse. »

La visite reprend dans la colline, où les anecdotes et le sourire de Fanny font merveille, jusqu’à l’atelier de Myriam Rétif qui prend le relais pour brosser à grands traits l’histoire de la Tuilerie Bossy et présenter son travail sur le raku. Il se fait faim, direction la pause déjeuner au restaurant l’Orée du bois à l’Écomusée, autour d’une assiette simple mais efficace - et d’un dessert qui tue. Là, à l’heure du café, Luc Langeron, directeur de l’Écomusée, vient tranquillement papoter et raconter l’histoire du passage de Casanova à Gardanne. On a envie de crier au mytho, mais l’histoire est trop belle.

L’après-midi se déroulera tranquillement à l’Écomusée, l’occasion d’apprendre que la Méditerranée abrite 10 % de la biodiversité mondiale. La satisfaction est unanime. « On est passés à l’Office de Tourisme en se disant qu’avec Marseille Provence 2013 il devait y avoir des choses... c’est comme ça qu’on a découvert Terre et Terroir, expliquent Evelyne et Gérard, de Bouc Bel Air. Vous êtes très accrocheuse, c’est un régal. Même à l’Office, l’accueil est extraordinaire. »

L’OFFICE DE TOURISME AFFIRME LA VOLONTÉ d’avoir voulu fédérer tout Valabre autour d’un circuit touristique d’exception. Il semblerait que la mission ait été relevée avec succès. « On en rêvait depuis dix ans avec les artisans de la Tuilerie ! sourit Marc Pavageau, propriétaire du domaine de La Féraude. L’idée, avec le lycée agricole, était de retrouver l’unité géographique et l’esprit de la colline, qui appartenait à la même famille il y a cent ans. L’Office est venu nous apporter l’étincelle qui nous manquait. »

Même son de cloches chez Myriam Rétif, artisan à la Tuilerie : « C’est un rêve qui se réalise. Et puis la Tuilerie, le lycée agricole, l’Écomusée... c’est une autre image de Gardanne. » On ne saurait que trop vous conseiller de venir vérifier, puisque les tarifs pratiqués sont très doux (30€ la journée avec le repas au restaurant l’Orée du bois et la visite de l’Écomusée, 10€ la demi-journée, sur réservation à l’Office). Le temps du Syndicat d’initiatives semble bien révolu.

« Je voudrais que Gardanne soit véritablement reconnue comme une ville touristique, sous toutes ses facettes, explique Josiane Bonnet, présidente de l’Office de Tourisme. Je dis que Gardanne a plein d’atouts cachés - j’en découvre tous les jours ! Nous sommes fortement impliqués dans une nouvelle Charte qualité qui va apporter encore plus d’exigence dans l’accueil du public. Avec Fanny et notre stagiaire Manon, nous avons d’ailleurs fait la chasse aux hébergeurs. Il y a désormais une offre de nuitées qui va de la plus simple à la plus luxueuse. »

Grâce à ses efforts, Gardanne serait très bien partie pour faire partie des quatre villes capables de passer la charte en 2013-2014, avec deux étoiles. Mais pas que. Les drôles de dames de l’Office (avec aussi Chantal et Françoise) sont actuellement formées à l’anglais. La structure travaille à améliorer l’accueil des personnes à mobilité réduite, et va dans les semaines à venir ouvrir un tout nouveau site internet, avec une nouvelle charte graphique. « On a fait appel à des pros, on n’a pas voulu faire du bricolage, » précise Josiane Bonnet. Et, tenez-vous bien, le référencement se fera sur le “Tourisme vert en Provence.” Les temps changent, assurément.

Philippe Pintore* : « Gardanne a des atouts qu’on ne retrouve pas ailleurs »

Quel bilan tirez-vous de l’action de l’Office en ce début 2013 ?

Il y a un saut qualitatif indéniable, dû à mon sens à l’implication des bénévoles et aussi au professionnalisme de la nouvelle responsable, qui a su faire rentrer l’Office de Tourisme dans une dimension nouvelle. Je vois tout ce qui s’y passe, y compris pour Marseille Provence 2013, d’un très bon oeil, ça prouve que Gardanne a des attraits touristiques qu’il ne faut pas négliger, bien au contraire.

Il y a de la place pour le tourisme à Gardanne ?

Écoutez, il n’y a pas de complexes à avoir. Vu de l’extérieur, Gardanne c’est avant tout une ville de Provence et la Provence ça suffit en soi à faire parler en Europe et dans le monde. Gardanne, avec ses spécificités, son histoire minière, a elle-même des atouts qu’on ne retrouve pas ailleurs. Il y a des choses à creuser, y compris dans le cadre du tourisme industriel. Après, depuis sa création, la Ville a toujours soutenu l’Office, dans les moments fastes comme dans les moments difficiles. Les engagements pris pour l’année 2013 le montrent encore une fois.

* élu délégué au Développement économique, Agriculture et Tourisme