Menace sur le centre mutualiste et le centre de secours minier

La santé, de réformes en méformes Stéphane Conty

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Alors que le thème de “l’action sociale” semble soudain devenu une priorité du gouvernement, notre commune mesure les effets de la politique menée jusqu’ici en la matière : le Centre de santé François-Billoux connaît des difficultés de financements et le Centre de secours minier doit faire face à la réforme de la sécurité sociale minière.

Les centres de santé connaissent depuis quelques temps des difficultés financières allant jusqu’à remettre en cause l’existence même de certains d’entre eux, tel le centre Paul-Paret à Marseille. Ils doivent faire face à une volonté de marchandisation des soins sur un secteur qui représente un marché de plusieurs milliards d’euros. Une directive européenne a conduit à l’instauration en 2002 d’un nouveau code de la mutualité qui impose la séparation des activités d’assurance (complémentaire santé) de la gestion des œuvres sociales (centres de santé en l’occurrence). En d’autres termes, les mutuelles fondatrices des centres de santé n’ont plus le droit de les financer.
Qui plus est, le nouveau code prévoit désormais que les mutuelles doivent disposer d’une réserve suffisante pour garantir le règlement intégral des engagements pris auprès de leurs adhérents.
Autre problème rencontré, la concurrence des compagnies d’assurances pour qui les préoccupations d’ordre social ne sont pas une priorité, et qui assurent principalement les gens peu coûteux en termes de soins ainsi que les groupements d’entreprises. De fait, elles pratiquent des tarifs plus bas que les mutuelles pour les gens en bonne santé et des tarifs beaucoup plus élevés pour les autres, qui se tournent alors vers les mutuelles. « Le système de solidarité des mutuelles où les “bien portant” paient en partie pour les malades est de moins en moins équilibré, les premiers délaissant les mutuelles pour se tourner vers les compagnies d’assurances, pour eux meilleur marché » constate Robert Visciano, directeur du centre de santé de Gardanne. Il souligne aussi que « les centres de santé ont toujours eu un rôle régulateur des tarifs, notamment pour l’optique et le dentaire, les praticiens libéraux ne pouvant se permettre de pratiquer des prix trop élevés par rapport aux nôtres, sous peine de perdre des patients. »
Pour continuer à exister et fournir une offre de soins de qualité, les centres de santé demandent l’aide financière des collectivités territoriales (certaines communes le font déjà comme Gardanne qui participe au fonctionnement de son centre), s’appuyant notamment sur leur rôle social important auprès des plus défavorisés dont ils sont souvent le principal recours pour l’accès aux soins. Une démarche qui illustre un nouvelle fois le transfert des responsabilités de l’État à d’autres collectivités. Étant donné la précarité qui ne cesse de se développer dans le pays, avec son cortège de délocalisations et de licenciements, et le contenu de la réforme de l’assurance maladie entérinée durant l’été, le rôle social des centres semble plus que jamais d’actualité.
Un rapport de la DDRASS remit récemment au Préfet va d’ailleurs dans ce sens. Ce dernier a proposé la tenue prochaine d’une table ronde entre tous les acteurs concernés, afin de chercher des solutions pour assurer le maintien des centres de santé, dont l’importance n’est plus à démontrer. Dans notre département ce sont 11 centres de santé et 17 centres dentaires qui sont menacés.
A Gardanne, le centre François-Billoux a ouvert ses portes en 1981 dans des locaux municipaux, sous la gestion de l’Union Départementale des Mutuelles de Travailleurs. Il représente une équipe médicale composée de 5 médecins généralistes, 20 spécialistes et 1 infirmière, ainsi que 4 dentistes et 2 orthodontistes. En 2002, 10 820 personnes ont fréquenté le centre dont 5 550 gardannais, soit 28 % de la population de la ville. Seulement la moitié des patients du centre sont adhérents aux Mutuelles de Provence, et 12,3 % d’entre eux sont des bénéficiaires de la CMU. Au total, ce sont 45 000 actes médicaux qui ont été réalisés en 2002, dont 20 800 en seule médecine générale. Devant de tels chiffres on comprend tout de suite l’importance d’un tel établissement sur notre commune dans lequel plus du quart de la population de la ville bénéficie d’un suivi médical.

Sécurité sociale minière : d’une gestion humaine à une gestion financière

Le 16 juin 2004 le conseil d’administration de la Caisse Autonome Nationale de la sécurité Sociale Minière (CANSSM) a adopté le projet de Convention d’Objectif et de Gestion (COG) du gouvernement, à l’exception de la CGT qui dénonce le projet dans sa forme actuelle.
Depuis quelques années le nombre d’affiliés diminue régulièrement de 4 à 5 % par an. Il y a actuellement 265 000 ayant-droits au niveau national, dont 55 % ont plus de 70 ans et dont la moyenne d’âge est de 72 ans.
La société de secours minière du Midi, installée à Gardanne, compte environ 10 000 affiliés et gère une circonscription administrative comprenant la région PACA et la Corse. La moitié de ses membres, implantés pour la plupart sur Gardanne et ses environs, bénéficient des services du réseau de soins (Gardanne, Biver, Gréasque) qui comprend 6 médecins à temps pleins, 12 infirmières, 2 cabinets dentaires et 2 pharmacies.
Le régime spécial minier est basé sur la gratuité des soins, un réseau de soins minier par des médecins salariés avec des pharmacies spécifiques. Ce réseau est constitué de centres de soins qui sont gérés par un conseil d’administration et de direction. La nouvelle convention prévoit que la gestion sera centralisée dans 7 caisses régionales, probablement celle d’Alès en ce qui concerne Gardanne. Chaque centre aura une obligation d’équilibre financier. « Jusqu’à présent la SSM avait une gestion humaine, avec la COG nous allons passer à une gestion financière. Les moyens ne seront plus alloués en fonction des besoins, on tentera d’adapter les besoins aux moyens alloués, qui seront nécessairement insuffisants dans un souci de rentabilité » déclare Guy Bonnet, administrateur CGT de la Sécurité Sociale Minière (SSM).
Jusqu’à présent la Caisse nationale (CAN) gérait l’ensemble de la SSM, ce qui représentait un tout cohérent où les secteurs bénéficiaires pouvaient combler les manques de ceux qui étaient déficitaires. La COG prévoit que la branche assurance vieillesse de la SSM passera sous gestion de la Caisse des dépôts et consignations, la CAN conservant la gestion de la branche maladie. Avec toutefois une différence notable : la compartimentation de chaque secteur. Avec cette nouvelle gestion, les secteurs bénéficiaires ne pourront plus couvrir les secteurs déficitaires comme par exemple les soins dentaires. « A terme, ce sont tous les pans déficitaires que l’on risque de voir disparaître au nom d’une saine gestion financière » souligne Guy Bonnet.
En 2005 les affiliés de la SSM auront eux aussi la Carte Vitale avec laquelle ils pourront êtres soignés hors du système de soins minier et prendre leur médicaments en dehors des pharmacies spécifiques au régime minier. De même, les affiliés du régime général auront accès aux centres du réseau minier. Toutefois, les ayant droits au régime minier ne bénéficieront pas dans ce cas de la gratuité des soins mais seulement du remboursement à 100 % du tarif sur les médicaments conventionnés, ce qui est loin d’être pareil, surtout avec la politique de déremboursement de médicaments qui est menée actuellement. « Ainsi, petit à petit, le régime spécifique minier va glisser vers le régime général jusqu’à disparaître définitivement par un démembrement progressif » conclut Guy Bonnet.

Quel financement pour la réforme de l’assurance maladie ?

La réforme de l’assurance maladie a un coût, et il convient de noter que ce sont principalement les assurés qui vont le supporter.
Sont prévues l’instauration du forfait d’1 e (dans un premier temps) payé par le patient pour chaque acte médical, et l’augmentation du forfait hospitalier de 13 e à 16 e dans les trois ans à venir (il était de 3,05 e lors de son instauration en 1983). Au programme également des hausses de la csg de 0,4 % pour les retraités imposables, de 0,7 % sur les revenus du patrimoine et de 2 % sur ceux des jeux.
Quand aux salariés, ils paieront la csg et la crds sur 97 % de leur salaire et non plus sur les 95 % actuels, ce qui équivaut donc à une augmentation d’impôts sur le revenu.
Pour les petits revenus ne pouvant bénéficier de la Couverture Maladie Universelle (CMU), une aide à l’acquisition d’une assurance complémentaire est prévue. Sont concernés ceux dont les ressources sont comprises entre le plafond de la CMU (566,5 euros) et ce plafond majoré de 15 % (651,47 euros). Le montant de l’aide sera de 75, 150 ou 250 euros, selon l’âge de l’assuré. Cette aide sera financée par un prélèvement sur les fonds de financement de la CMU, donc sur les fonds de l’assurance maladie.