Solidarité

L’aide sociale au quotidien Energies 310 - Carole Nerini

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Lorsque l’on parle du CCAS (Centre communal d’action sociale) on entend aides sociales, retraités et foyer 3e âge,repas et grandes manifestations, portage de repas à domicile, aides ménagères ou encore téléassistance. Mais le quotidien des agents va bien au-delà. Chaque jour, les interventions sociales s’effectuent, dans l’ombre pour la plupart, dans des domaines des plus variés.

Dans la salle d’attente du CCAS, le téléphone sonne en continu ; renseignements, prises de rendez-vous, demandes de dossiers, signalements, parfois il faut agir vite. Il y a même des personnes, assises là, qui n’ont pas rendez-vous et qui semblent attendre une réponse ou une solution rapide à leurs problèmes... le quotidien des agents du CCAS. Nous avons en quelques jours relevé des exemples de cas qu’ils ont eu à traiter, en direct ou en faisant appel à d’autres structures du réseau social.

Ce vendredi, il est à peine 9h. Le directeur du CCAS, Georges Felouzis, est en retard à notre rendez-vous car il a du recevoir un jeune “Sans domicile fixe” et lui expliquer qu’il n’avait ni emploi ni logement, qu’il lui manquait 25 € pour pouvoir refaire sa carte d’identité pour s’inscrire aux Assedic et qu’il semblait avoir des problèmes de santé.

« J’ai appelé le Secours catholique afin qu’ils achètent un timbre fiscal à 25 €. Puis j’ai appelé l’Espace santé jeunes pour qu’il soit suivi médicalement. Il ira au centre de santé François-Billoux dans la matinée. J’ai ensuite contacté un Centre d’accueil et d’orientation afin qu’il soit pris en charge dans de bonnes conditions. »

Le tout en quelques minutes... Certains ont accepté de nous expliquer ces rencontres.

Sabrina, 26 ans, sans travail, sans domicile

C’est aujourd’hui une jeune fille de 30 ans souriante, pleine de joie et de motivations. Pourtant, elle a vécu des jours bien difficiles. Il y a quatre ans, au bord de la déprime après la perte de son emploi et de son logement, elle a poussé la porte du CCAS. Un geste qui n’est déjà pas évident pour tout le monde.

« Je ne savais pas où dormir, se rappelle-telle. J’ai immédiatement rencontré une assistante sociale qui m’a aidé à effectuer mes démarches administratives pour un logement dans un premier temps. Elle a téléphoné dans des foyers d’accueil, mais à proximité, tout était complet. J’ai bien compris qu’elle ne voulait pas que j’aille dans n’importe quel foyer. Une place était disponible à La Ciotat, où je suis restée une semaine, le temps qu’une chambre se libère dans un foyer aux Milles. Depuis un an et demi, je vis à la résidence Abbé-Pierre et nous continuons les démarches pour que je puisse avoir mon propre logement. Entre temps, j’ai trouvé du travail, au CCAS, grâce à mon expérience dans le social auprès des personnes âgées. Aujourd’hui, tout va bien et je sais à qui je le dois. Je n’y serais jamais arrivée seule. Le travail qu’ont effectué les assistantes sociales a été fantastique, elles me rendaient visite, m’ont aidée pour manger, et elles ont toujours été à l’écoute. J’étais rassurée... moralement, elles m’ont sauvée. »

Éric, Sans domicile fixe

Vous l’avez peut-être aperçu à l’abri sous l’espace Bontemps ou sur le trottoir d’en face, “faisant la manche” comme il dit, avec sa chienne. Éric Tetaert a 52 ans, son compagnon de galère en a deux. Depuis le mois de septembre, c’est ici qu’il survit. « J’étais comptable dans une société à Roubaix. La boîte a fermé, j’ai perdu mon fils, j’ai pris mon baluchon. Je suis resté plusieurs année à Aix où je faisais partie des enfants de Don Quichotte. Puis j’en ai eu marre, je suis venu à Gardanne. Dès mon arrivée, le directeur du CCAS est venu me voir en me demandant de me rendre à son service. Ce que j’ai fait rapidement. Il a tout fait pour que j’accepte d’aller dans un foyer, mais les foyers, je sais ce que c’est. Je ne peux plus. En plus, ils n’acceptent pas les chiens et je ne pourrais jamais la laisser, on a traversé trop de choses ensemble.  »

Alors, en cette période hivernale, c’est au gymnase de Fontvenelle qu’il dort, au chaud, avec la possibilité de prendre une douche. « Les SDF comme les mal logés, c’est toute l’année que nous les suivons, explique t-on au CCAS. Nous faisons tout notre possible pour essayer de reconstruire les pans de leur vie en matière de santé, de logement, d’emploi. En hiver, il est clair que nous sommes plus vigilants. Nous avons des fiches personnelles pour toutes ces personnes, les partenaires avec qui nous travaillons au quotidien les ont aussi. Pour chacun, nous allons à leur rencontre, nous les informons des diverses aides dont ils peuvent bénéficier au sein de la commune, la mise en place d’une douche au Secours catholique, les actions du Secours populaire, la possibilité de pouvoir se nourrir grâce aux Restos du coeur. Certains refusent tout ça pour des raisons qui n’appartiennent qu’à eux. A tous, une solution a été proposée avant l’hiver. Il y en a qui ont refusé, d’autres qui ont accepté, d’autres encore qui se sont rétractées après quelques semaines. »

Les Gardannais, à maintes reprises ont des gestes solidaires envers eux. Pas de mauvais regard, pas de mauvaises paroles, mais des dons de vêtements, un bonjour, de la nourriture. « Juste avant Noël, j’ai voulu aller manger dans un petit restaurant pas très loin d’ici (ici, c’est l’espace Bontemps), le luxe... Quand je suis entré, un peu gêné, la responsable m’a dit : Prenez ce que vous voulez, c’est pour la maison. Ça aussi ça réchauffe le coeur. »

Jeanne Taranta, 97 ans, Biver

Jeanne Taranta est arrivée à Biver à l’âge de deux ans. Elle en aura 98 au printemps. Pendant des années, elle a fréquenté le foyer Nostre Oustau où elle venait se restaurer, discuter avec ses amies, participer aux animations. Elle en était contente. « Vous savez, à 85 ans, je travaillais encore à la campagne où je ramassais les légumes. Tous les jours, jusqu’au mois d’août dernier, je prenais le bus de Biver jusqu’à Gardanne pour aller au foyer. Puis j’ai fait une chute, je ne m’en remets pas. Je ne peux plus sortir et je suis seule à la maison. Bientôt, je vais aller passer quelques semaines dans une maison de repos.  »

Au CCAS, tout le monde la connaît, c’est une dame forte, qui ne se plaint jamais malgré son grand âge. Elle bénéficie du portage des repas à domicile, du système de téléassistance, d’aides ménagères deux fois par semaine. « C’est une personne qui a toute sa tête mais qui est très seule, explique Christel Cellamare, responsable des aides à domicile du CCAS. De temps en temps, je l’appelle pour avoir des nouvelles. Nous intervenons lorsqu’elle en a besoin, lorsqu’elle est en litige avec la société qui gère les maisons de mineurs, par exemple. L’aide ménagère, hors de son temps de travail l’accompagne parfois à ses rendez-vous médicaux, va lui faire quelques courses. Son implication va bien au-delà des 4 heures qu’elle fait chez elle. »

Il ne se passe pas un jour au CCAS sans que les travailleurs sociaux n’interviennent dans des cas d’urgence, en faisant appel aux associations de la ville, aux structures sociales du département ou de la région. « Les personnes qui viennent demander de l’aide, qu’elle soit ponctuelle ou sur du long terme sont prises en charge au cas par cas, expliquent Georges Felouzis et Josiane, assistante sociale.Parfois, un seul coup de téléphone suffit, parfois, il faudra des jours, des mois, des années de suivi. Il y a des jours où c’est difficile pour nous aussi, il y a des cas très lourds. On s’attache vite à certaines personnes, on leur rend visite, on leur téléphone pour prendre des nouvelles, on est attentif à toute évolution. »

Chez les personnes âgées, l’attention est omniprésente. Lors des chutes de neige, elles ont été plus de 250 à être contactées par les agents du CCAS. Malika est à l’accueil depuis quelques mois à peine, et elle prend très à coeur son travail. « Le 7 janvier, nous avons appelé les personnes les plus dépendantes. Malgré les conditions difficiles, j’ai pris la voiture, je suis allée faire quelques courses pour des retraités, je leur ai porté du pain. Du côté du portage des repas, les agents ont parfois parcouru des centaines de mètres à pied, la neige jusqu’au genou afin que les bénéficiaires puissent manger. Je pense que lorsqu’on choisit de travailler dans le secteur social, ce n’est pas un hasard. »

Maryse Blangero * : « En partenariat avec les associations »

L’action sociale d’urgence est-elle une priorité de la municipalité ? En raison des crises financières et économiques, nous remarquons que de plus en plus de travailleurs pauvres, de personnes en situation de surendettement ou en impayé de loyer s’adressent au CCAS. La municipalité a donc décidé de renforcer le suivi des populations fragilisées. La mise en place du plan hivernal illustre cette démarche tout comme le plan Canicule, la prévention lors des expulsions domiciliaires, la domiciliation pour les sans domicile, l’accompagnement social des vieux travailleurs émigrés ou la coordination des aides d’urgences avec les associations caritatives. C’est le travail collectif avec ces dernières qui nous permet, à Gardanne, d’améliorer l’efficacité de la réponse et ainsi de mieux couvrir les besoins des usagers.

* adjointe déléguée à l’action sociale