Gardanne en pointe contre l’effet de serre Energies 445 - Jérémy Noé

Publié le

Gardanne a de nombreuses raisons de valoriser ses projets, entre solutions techniques de pointe et actions quotidiennes.

Le saviez-vous ? Votre ville a depuis un certain temps déjà amorcé le virage de la transition énergétique : il s’agit selon la volonté des élus de produire à l’horizon 2020 autant d’énergies que ce que les habitants en consomment, sans émission de gaz à effet de serre, principal coupable du réchauffement climatique. Ainsi, depuis 2012, la centrale de biogaz de La Malespine produit de l’électricité à partir de la décomposition des déchets (photo ci-contre) pour l’équivalent de la consommation hors chauffage de 2600 habitants, tout en évitant de rejeter 1950 tonnes de CO2 par an. Depuis fin 2013, le parc solaire (panneaux photovoltaïques) des Sauvaires, deuxième plus grand du département, produit de l’électricité pour l’équivalent de 10 000 habitants (hors chauffage), et accessoirement rapporte 200 000 euros par an à la Ville.

Optimiser les consommations
Ces grands chantiers viennent en cerise sur le gâteau d’une politique des petits pas sur le patrimoine et le fonctionnement de la Ville, avec des objectifs très simples : éviter le gaspillage, consommer intelligemment, faire des économies. Ce dernier point revêtant de plus en plus d’importance dans un contexte de pression budgétaire accrue. Depuis 2010, la ville a développé un Plan d’action global sur les énergies (le Page) qui couvre autant l’isolation des bâtiments scolaires que le développement de chaudières à bois (le charbon ayant totalement disparu depuis 2013), l’installation d’éclairages à Led, de chasses d’eau et robinets économiques, le remplacement de véhicules à essence par des véhicules électriques… Cette année les écoles du centre, Prévert et Beausoleil, ont été équipées de panneaux photovoltaïques qui assurent environ la moitié de leurs besoins, tandis que la crèche La Farandole a été dotée d’un ballon d’eau chaude solaire.

Zéro produits nocifs
Au delà de la politique énergétique, les pratiques environnementales sont elles aussi revues. Les services municipaux ont complètement abandonné l’usage de produits phytosanitaires (pesticides, désherbants…) pour les remplacer par... de l’huile de coude et un petit outillage performant. La restauration scolaire - distinguée en 2013 par l’UFC Que Choisir pour la qualité de ses menus - s’approvisionne en fruits et légumes auprès de la plate-forme départementale Goûtez au 13, qui comporte deux agriculteurs gardannais. Des produits de saison et locaux, “what else” pour montrer à la nature qu’on tient à elle ?

De la géothermie à Morandat
Enfin et non des moindres, sachez aussi que votre ville développe au puits Morandat un projet de géothermie. Il s’agit de prendre les millions de mètres cubes d’eaux souterraines accumulés dans la mine depuis sa fermeture en 2003 pour profiter de leur température favorable afin de chauffer et refroidir des bâtiments. Le projet élaboré de longue date achèvera son étude de faisabilité cet hiver. D’une puissance d’environ 500kW, le prototype sera raccordé au hall des mineurs, à l’hôtel d’entreprise, au siège de la Semag, la Société d’économie et d’aménagement de Gardanne et ses environs, ainsi que du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). Et pourra éventuellement monter en puissance. Le projet, dont il n’existe que de rares exemples aujourd’hui dans le monde, a d’ores et déjà retenu l’attention de l’Ademe, Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Gardanne, ville exemplaire ? Ses actions au quotidien attestent de son engagement.

Questions à Anthony Pontet, Adjoint délégué à la transition énergétique et Bernard Bastide, Adjoint délégué à l’environnement

Énergies : La ville de Gardanne n’a pas attendu 2015 pour faire des efforts.
Anthony Pontet : Historiquement, la Ville a toujours été concernée par la problématique de l’énergie. Au moment de la reconversion du Bassin minier, la question de la transition énergétique se posait déjà et a été fortement défendue et suivie par Roger Meï. Depuis 2008, la Ville s’est tournée vers les nouvelles énergies en favorisant le mix énergétique, à la fois dans le cadre du développement technologique et économique, mais aussi dans la sensibilisation aux bonnes pratiques.

Énergies : C’est dans ce cadre qu’est né le Page (Plan d’actions globales sur l’énergie)
A. P. : Exactement. C’était un plan d’actions qui permet de mieux coordonner nos actions et de leur donner du sens. Il fonctionne bien, nous avons réduit considérablement nos consommations et mieux maîtrisé l’utilisation de nos énergies.

Énergies : Quid de la géothermie ?
A. P. : Après le biogaz,le photovoltaïque, la mise en fonctionnement de l’éclairage à Led, la géothermie est la solution d’avenir. Elle va nous permettre d’aller beaucoup plus loin : chauffer nos propres bâtiments en utilisant les calories des eaux de la mine. Très peu de villes l’ont fait avant nous, c’est une chance pour Gardanne.

Énergies : Vous avez bon espoir que les Gardannais puissent participer ?
A. P. : Je l’espère. La gestion en circuits courts et le recyclage des déchets sont essentiels. Nous sommes en train de mettre en place en partenariat avec les parents d’élèves et les enseignants, le recyclage dans toutes les écoles. Nous allons recycler également le matériel scolaire en fin de vie et toutes ces actions nous mènent à être plus respectueux de l’environnement et par conséquent, de limiter l’impact sur le climat. Cette démarche doit passer par une sensibilisation des enfants car l’avenir, c’est eux.

Énergies : De votre côté, vous avez développé les circuits courts et le zéro phytosanitaire ?
Bernard Bastide : Notre position est de favoriser les circuits courts pour réduire les intermédiaires et fournir des produits de qualité qui arrivent à maturité naturellement et non dans des serres surchauffées, des frigos ou ailleurs comme les bananes “mûries” pendant le transport. Cela me tient à coeur, afin de travailler avec les paysans du coin et que les enfants aient de la nourriture saine. Un mot aussi sur le ”zéro phyto” : cela avait démarré avec le Saba. Depuis 2014 on avait arrêté pour les espaces verts et la voirie. Depuis cette année on les a supprimé dans tous les services, avec l’investissement dans des appareils comme une micro-balayeuse ou un bruleur thermique. Et puis pour tout vous dire, pour moi, il vaut mieux un peu d’herbe sur les trottoirs que des produits dans l’estomac...

POINTS DE VUE CROISÉS

Nicolas Fortuit, Directeur de la Semag (Société d’économie mixte et d’aménagement de Gardanne)

"Le projet de géothermie ne part pas de zéro, mais presque. Les nombreuses études sur le sujet sont toutes non conclusives et il n’y a aucun projet similaire en France, avec des puits de ce type. Il faut savoir qu’on est sur le plus grand puits d’Europe. C’est une chance pour Gardanne car aujourd’hui il serait difficile de construire un tel équipement. Sachant que les règles habituelles de la géothermie ne s’appliquent pas entièrement au puits Morandat, d’une profondeur de 1000 mètres avec entre 700 et 800 mètres d’eau. L’un des objectifs de l’étude de faisabilité est de déterminer où capter l’eau, où on la rejette, par rapport à la saison... c’est un équipement qui a vocation à durer de cinquante à cent ans. Ca peut être coûteux au départ, mais l’Ademe est prête à subventionner. L’objectif de 2017 pour la livraison me semble atteignable."

Irène, interrogée sur le marché de Gardanne

"Il est très difficile d’y voir clair dans tous les chiffres et informations qui sont donnés sur le climat, mais je pense que le réchauffement climatique est une réalité. Je suis bretonne, je vais souvent en Bretagne, je vois bien comment la mer prend le pas sur le littoral. J’ai un peu suivi la Cop 21, forcément. Ce serait bien qu’on arrive à changer les choses, mais ça va être difficile. Personne n’a la même façon de voir, et les pays sont très différents les uns des autres... De notre côté on essaie déjà de changer de mode de vie, petit à petit, on s’habitue à certaines petites choses, comme le tri sélectif - qui est dans les gènes depuis très longtemps en fait ! - Se passer de voiture, rouler en voiture électrique ? Mais je roule déjà beaucoup moins ! Rouler pour rien c’est pas la peine. Je suis à la retraite, je limite mes déplacements, je marche plus, ça permet de faire de l’exercice journalier. Le mot de la fin ? J’espère qu’on arrivera à changer les mentalités, mais ce ne sera pas simple."

Yazid Chebah, Économe de flux au service Environnement

"Depuis 2010 et les débuts du Page, la Ville a réduit sa consommation de 18 millions de Kw/h de fluides (électricité, gaz, granulés de bois, eau...) à 12,7 millions, et a arrêté totalement l’utilisation du charbon. Nous sommes en train de faire le recensement de tout les bâtiments, les utilisations qui en sont faites, leurs consommations électriques, de chauffage et de voir les améliorations qui peuvent être portées, que ce soit au niveau du comportement, petits travaux et investissements techniques (horloges, régulateurs...) et gros travaux (isolation, menuiserie...). Le résultat sera rendu aux élus avant la fin d’année pour pouvoir anticiper sur le budget."