Solidarité

Contre les expulsions locatives, un combat permanent Energies 333 - Stéphane Conty

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L’arrivée du printemps n’est pas seulement synonyme de retour du beau temps. C’est aussi la reprise des expulsions locatives, auxquelles la municipalité est farouchement opposée lorsqu’elles sont la résultante de graves problèmes économiques et sociaux. C’est pour repérer ces problèmes en amont et tenter d’y trouver une solution que le CCAS oeuvre toute l’année.

Actuellement à Gardanne, le Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) suit 58 dossiers qui pourraient aboutir à une expulsion locative. « Les situations sont très variées. Nous suivons des personnes âgées de 30 à 89 ans, salariées, sans emploi ou retraitées » explique Josiane Karl, assistante sociale au CCAS. Sur les 58 dossiers suivis, 29 concernent des célibataires, 12 des familles monoparentales, 12 des couples avec enfants. Il y a 25 cas de personnes salariées et 17 retraités ou pensionnaires.

« Depuis un mois nous sommes mobilisés à temps plein sur les expulsions locatives, commente Georges Felouzis, directeur du CCAS de Gardanne. Nous avons trois assistantes sociales qui travaillent toutes l’année pour anticiper et prévenir les expulsions. C’est un choix de la commune de faire un travail de fond en amont pour éviter d’en arriver là. Nous avons des réunions régulières avec les élus pour étudier les différents cas. »

Depuis 1999 existe une charte de prévention des expulsions locatives qui énnonce que tout doit être fait pour ne pas laisser les familles en arriver à l’expulsion. Une charte dans laquelle commune, services sociaux, préfecture, gendarmerie et bailleurs sociaux sont parties prenantes. A Gardanne, tous les trois mois les assistantes sociales rencontrent les différents acteurs sociaux tels que les bailleurs sociaux, la CAF, l’association d’aide à l’insertion... « Lors de ces réunions nous faisons le point sur les familles identifiées par les différents acteurs, nous croisons une partie de nos informations. C’est une manière d’anticiper les cas de possibles expulsions » précise Josiane Karl.

La procédure qui peut mener à l’expulsion est bien formalisée. Il y a une première phase d’assignation, durant laquelle le locataire reçoit un courrier délivré par un huissier de justice, l’informant qu’une procédure est engagée. Il doit alors se présenter au tribunal à une date définie. Dans le même temps, l’huissier a obligation d’informer le Préfet de région de la procédure en cours. Ce dernier dispose alors d’un délai de deux mois pour demander une enquête sociale.

« Si c’est nous qui sommes sollicités, nous essayons de rencontrer les gens pour qu’ils nous expliquent leurs problèmes. Nous pouvons alors leur faire des propositions pour trouver une solution, comme par exemple la constitution d’un dossier de surendettement ou la mise au point d’un protocole d’échéancier de paiement, » explique Georges Felouzis.

Vient ensuite le jour de l’audience. « Il faut absolument que le locataire aille au tribunal pour prouver sa bonne foi. La présence d’un avocat n’est pas obligatoire, » souligne Georges Felouzis. Le juge va alors statuer. Il peut donner un délai ou décider d’aller à l’expulsion. « Si le juge décide l’expulsion, le bailleur saisit la sous préfecture qui demande deux enquêtes, l’une par nos services, l’autre par la gendarmerie. A ce moment-là nous rencontrons les gens pour essayer de les mobiliser. Ensuite nous rendons les résultats de notre enquête au sous-Préfet qui soit accepte l’expulsion, soit décide d’y sursoir. Quand le Préfet accorde le concours de la force publique pour procéder à l’expulsion, il en avertit la Mairie. Et là, si la famille est de bonne foi, nous nous mobilisons. Souvent le Maire appelle lui même les gens concernés même si parfois certaines refusent de nous rencontrer et de nous répondre. »

Sur les 58 dossiers en cours à Gardanne, 22 concours de la force publique ont été accordés, et pour l’heure deux ont abouti à une expulsion effective. « Cette année ça s’est durci. Nous n’avons pas plus de dossiers, mais les situations sont plus préoccupantes, la marge de négociation est plus serrée, les procédures plus contraignantes. Et puis on voit des gens qui sont un peu à bout, dont on sent qu’ils ont lâché prise » remarque Georges Felouzis. Un constat qui ne peut que conforter la municipalité dans son action pour prévenir les risques d’expulsions locatives.

Maryse Blangero * : « Nous sommes là pour les aider, pas pour les juger. »

Quelle est la position de la commune en ce qui concerne les expulsions locatives ?

Nous nous opposons aux expulsions. L’année dernière le maire Roger Meï, Yveline Primo, première adjointe et moi-même, sommes directement intervenus pour refuser une expulsion en cours suite à une erreur des services de la préfecture. Il y a des cas que nous soutenons où sont concernés des enfants, une mamie de 88 ans, des gens en grande difficulté. D’autres ont des revenus et ne paient pas. Dans ces cas là, la municipalité ne peut pas cautionner. Nous sommes là pour aider les familles en réelles difficultés, pas pour les juger.

Par ailleurs, quel bilan tirez-vous de l’accueil d’urgence cet hiver à Gardanne  ?

Nous avons fermé le premier avril le gymnase Fontvenelle qui recevait en urgence les personnes se trouvant momentanément sans domicile. Ce gymnase avait été ouvert en début d’hiver sans attendre la demande de la préfecture. Nous y avons accueilli en tout et pour tout dix personnes, ce qui s’explique notamment par le très bon travail réalisé en amont par le personnel du CCAS.

* adjointe en charge de l’action sociale