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Collèges : questions pour la future rentrée Bruno Colombari

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C’est généralement début mars que les conseils d’administration des collèges votent la répartition des heures de cours attribuées par l’Éducation nationale pour l’année suivante. La diminution depuis plusieurs années des moyens amène ces établissements à revoir certains projets qui favorisaient jusqu’alors l’apprentissage des enfants. Des enseignants se mobilisent sur ces questions.

Pour la plupart des parents d’élèves, la DGH n’est qu’un sigle de plus parmi les dizaines qui fleurissent dans l’Éducation nationale. Pourtant, la dotation globale horaire, votée en début d’année par le conseil d’administration du collège (dans lequel siègent des parents, des enseignants, des élèves délégués, du personnel administratif et la direction), permet de faire des choix sur la répartition des heures de cours dans les différents niveaux : soutien dans les matières principales, itinéraires de découverte, langues vivantes, travail en groupe pour les matières scientifiques...

Une décision importante, donc, qui se répercute évidemment sur les emplois du temps à la rentrée. Mais le conseil d’administration ne vote pas le montant de ce nombre d’heures (imposé par l’académie), uniquement la répartition (proposée par le chef d’établissement). Le volume est fixé en fonction des effectifs, et des priorités budgétaires. Autant dire qu’il s’agit souvent de gérer la pénurie. D’autant qu’en supprimant les ZEP (zones d’éducation prioritaire) et en créant les Collèges Ambition réussite (26 pour l’académie), le ministère enlève d’une main ce qu’il donne de l’autre (mille postes d’enseignants annoncés pour ce nouveau dispositif). Une demi-heure hebdomadaire disparaît ainsi dans les emplois du temps des cinquième et des quatrième.

Pénurie de moyens

Ce que constatent les enseignants, c’est que les effectifs prévisionnels sont systématiquement sous-évalués en février. Ils tiennent compte évidemment du nombre d’élèves en section inférieure et qui vont quitter l’école primaire, mais difficile de savoir combien de familles vont s’installer dans le secteur pendant l’été, ou combien vont partir. « Depuis la fin des années 80, les collèges sont autonomes pour répartir leurs heures, » souligne Daniel Gobe, professeur d’histoire-géographie au Pesquier et représentant syndical SNES/FSU. « C’est l’excédent de la masse horaire qui permet de faire des choses spécifiques. Au Pesquier, par exemple, on avait ainsi pu mettre en place de l’anglais renforcé, deux langues vivantes en sixième, la sixième-cinquième en trois ans pour les élèves en difficulté, une quatrième technologique bien dotée... En quinze ans, tout ceci a disparu. Nous avons perdu environ 10 % des moyens horaires attribués par élève. Pour les enfants en difficulté, qu’est ce qui va rester comme avenir ? L’apprentissage à 14 ans ? Dans des classes qui ne sont pas adaptées à leur besoin, ils s’ennuient, ils perturbent. Là où on avait des aideséducateurs qui pouvaient aider les élèves pendant les heures de permanence, on n’a plus que des surveillants, moins nombreux, et dont le statut est encore plus précaire. »

Des remplacements qui se font attendre

Frédéric Valentin, enseignant en histoire- géographie à Gabriel-Péri (représentant syndical CGT), constate « la fonte du nombre d’heures qu’on nous octroie depuis six ans. Et quand le nombre d’élèves baisse, ce qui ne sera pas le cas pour la rentrée prochaine, la dotation horaire baisse d’autant, parfois plus vite. Et si l’académie a sous-évalué les effectifs, ce qui est fréquent, c’est le volant d’heures supplémentaires qui est augmenté, car elles coûtent moins cher que les autres. »

Les remplacements de courte durée, qui sont devenus obligatoires au 1er janvier (ils se faisaient avant sur la base du volontariat) : « Nous sommes en opposition frontale à ce système. Pourquoi  ? Parce que si on accepte ça, on va vers l’annualisation du temps de travail. Les textes disent qu’on peut faire des remplacements dans un maximum de 5 heures par semaine et de 60 heures par an. » explique Daniel Gobe. « Ça ne fonctionne pas. Déjà, l’académie n’arrive pas à remplacer les absences prévisibles, comme les congés maternité. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas assez de remplaçants, ils coûtent cher. Alors on fait appel à des vacataires, des contractuels, ou aux heures supplémentaires. »

D’autre part, il semble que la Caisse nationale d’assurance maladie fasse de plus en plus pression sur les médecins pour que ceux-ci réduisent les arrêts de travail, ou du moins ne les accordent que sur des périodes courtes, quitte à les renouveler. Or, il faut attendre quinze jours (souvent plus) pour qu’un enseignant de collège soit remplacé. « Les absences, contrairement à ce qu’on pourrait croire, sont moins la conséquence d’arrêts maladie que de départ en formation, pour des durées très courtes qui ne donnent pas lieu à des remplacements, souligne Daniel Gobe. Si les formations étaient moins fréquentes mais sur des périodes plus longues, on pourrait être remplacés. »

Enfin, difficile d’y voir clair sur les conséquences pratique de l’apprentissage à 14 ans, intégré dans la loi dite de l’égalité des chances, et qui devrait entrer en vigueur dès la rentrée 2006. Il prévoit la signature d’un contrat de travail à l’issue de la première année et la possibilité de revenir au collège. Il faut savoir qu’un apprenti ne suit que treize semaines de cours par an. De plus, à quel âge l’orientation se fera ? A13 ans ? L’initiative, qui se veut être une réponse à l’échec scolaire (150 000 jeunes finissent chaque année leur scolarité sans qualification), ne risque-t-elle pas de dévaloriser la formation professionnelle ? Enfin, derrière cette mesure, n’est-ce pas la remise en cause du collège unique et de la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans qui se profile ?

Une Sixième “bilangue” à Gabriel-Péri

Deux innovations sont à noter pour le collège du centre-ville : la création d’une classe “bilangue” en sixième, et une unité pédagogique d’intégration (UPI), sur laquelle nous reviendrons prochainement. La classe bilangue consiste à donner la possibilité aux élèves qui le souhaitent d’apprendre deux langues vivantes en sixième, l’anglais et l’allemand, à raison de trois heures chacune (contre quatre heures de langue vivante 1 actuellement). Ce choix devra être poursuivi jusqu’en troisième, il ne sera donc pas possible de prendre une autre langue vivante en quatrième (italien ou espagnol). Le recrutement pour cette classe se fera sur l’ensemble du secteur et ne dépendra pas de la carte scolaire, même si on peut penser que les élèves de la commune seront prioritaires.