Budget 2016, préserver le service public Energies 455 - 25 mai 2016 - Bruno Colombari

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Le budget 2016 de Gardanne s’élève à 50 millions d’euros, dont 39 millions consacrés au fonctionnement et 11 millions à l’investissement. L’entrée dans la Métropole et la baisse des dotations de l’État contraignent la Ville à augmenter la fiscalité et à réduire ses dépenses.

Même si vous gérez votre budget de façon raisonnable, si vos dépenses sont stables et que vos ressources diminuent, que se passe-t-il ? Au bout d’un moment, les secondes vont rattraper les premières, puis les dépasser. C’est ce qu’on appelle l’effet ciseaux, dont les lames se croisent. À Gardanne, les recettes sont supérieures aux dépenses depuis de nombreuses années, ce qui permet à la Ville d’autofinancer ses réalisations et de réduire sa dette, dont le montant par habitant est nettement en dessous de la moyenne nationale pour des communes de taille équivalente.

Mais depuis que l’État a mis les collectivités locales à contribution en taillant dans la Dotation globale de fonctionnement, les ressources diminuent chaque année (encore 800 000 € de perdus en 2016, trois millions d’euros sur la période 2015-2017). Et l’entrée dans la Métropole Aix-Marseille Provence depuis le 1er janvier (lire notre dossier dans énergies 454) n’arrange pas les choses : d’ici 2018, deux millions d’euros supplémentaires seront perdus en raison de la baisse de l’allocation compensatrice.

LES TRANSPORTS SCOLAIRES RESTENT GRATUITS

Il est donc inévitable que la fiscalité locale, stable depuis près de dix ans, augmente légèrement (+2,5 %). Ce qui devrait générer des recettes supplémentaires d’un demi million d’euros, compte tenu du fait que les habitants verront la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (service géré par la Métropole) augmenter. En compensation, une nouvelle tranche pour les plus bas revenus est créée pour les tarifs calculés sur le quotient familial. Et les transports scolaires restent gratuits en 2016 pour les élèves de la maternelle au collège, alors que le budget de la restauration scolaire sera inchangé afin de préserver la qualité des repas proposés aux enfants.

Le budget de fonctionnement des services municipaux a été réduit de 30 %, de même que l’enveloppe des subventions aux associations, en tenant compte pour ces dernières de leur activité et de la présence ou non de salariés. Au niveau investissements, deux millions et demi d’euros seront consacrés à de grands projets comme la rénovation du foyer troisième âge, la nouvelle cuisine centrale et les travaux d’accessibilité des bâtiments publics, deux millions d’euros iront à des travaux de voirie et 400 000 € à l’entretien des bâtiments communaux. 600 000 € seront consacrés à la poursuite du plan numérique dans les écoles et à la modernisation de la médiathèque.

SOUTIEN AUX DÉMARCHES PARTICIPATIVES

La Ville poursuit par ailleurs ses actions en terme d’accès au logement, de politique éducative (en réponse à l’augmentation de la fréquentation des activités périscolaires), d’aide aux demandeurs d’emploi (avec la mise en place du guichet unique emploi-insertion), d’accompagnement social des personnes en précarité via le CCAS, de prévention de la délinquance (avec le dispositif Voisins attentifs et solidaires), d’accès au droit (notamment pour les jeunes) et d’éducation par le sport. Les démarches participatives et le bénévolat seront soutenus, notamment à partir de la Maison de la vie associative qui intègre désormais le dispositif Citoyen solidaire. Autant d’orientations visant à maintenir la qualité des services de proximité à la population, en dépit des contraintes budgétaires.

LES POINTS CLÉS

- Une hausse limitée de la fiscalité communale (+2,5%) compensée par une nouvelle tranche pour les plus bas revenus dans le calcul du quotient familial.
- Un maintien de la gratuité des transports scolaires et du budget de la restauration pour assurer la qualité des repas.
- Une anticipation des conséquences de l’entrée dans la Métropole et de la baisse des dotations de l’État.
- Le plan numérique dans les écoles, la modernisation de la médiathèque et l’accessibilité des bâtiments publics sont les projets structurants de l’année 2016 avec le début des travaux du foyer troisième âge et le projet de nouvelle cuisine centrale.
- Le budget de fonctionnement des services municipaux diminue de 30% en moyenne, ainsi que l’enveloppe attribuée aux associations.

Questions à Yveline Primo, Première adjointe au maire, déléguée aux finances

Énergies : Ce n’est qu’à partir de 2018 que les effets de l’entrée dans la Métropole vont se faire sentir. Comment la Ville s’y prépare-t-elle ?

Yveline Primo : L’intégration forcée dans la Métropole, que nous avons combattue, bouleverse complètement l’organisation décentralisée que nous connaissons depuis le début des années 80 et éloigne irrémédiablement les citoyens des pouvoirs de décisions. Au préalable il faut rappeler que depuis 2010 nous subissons une remise en question de l’autonomie financière et politique des communes sans précédent.

Tout d’abord avec la suppression de la taxe professionnelle qui prive les villes industrielles comme la nôtre de recettes importantes qui ont été remplacées par de nouvelles taxes dont la partie essentielle est fixée au niveau national. À cela s’est rajoutée la diminution des dotations de l’État étalée sur quatre ans. Avec la ponction prévue en 2017, la commune aura perdu plus de trois millions d’euros. Pour illustrer ce processus la Ville par son pouvoir de décision maîtrisait 71% de ses recettes en 2008.

Aujourd’hui, 63% des recettes de fonctionnement de notre budget dépendent de décisions prises par d’autres échelons (État, intercommunalité). Dans ce contexte le budget 2016 est un budget d’anticipation en prévision des conséquences de l’entrée dans la métropole. Il y avait donc une nécessité de prendre les devants afin de préserver les services de proximité aux usagers. C’est pour nous essentiel, au moment où la politique d’austérité du Gouvernement réduit l’intervention des services publics, de résister en maintenant des services locaux de proximité pour répondre aux besoins des habitants de Gardanne- Biver.

É. : Y avait-il une alternative à l’augmentation des impôts locaux, à la baisse des dépenses de fonctionnement des services et des subventions aux associations ?

Y. P. : La gestion de la commune mise en oeuvre depuis des années a permis d’avoir une situation financière saine, sans augmentation d’impôts de notre partdepuis dix ans et avec un niveau d’endettement des plus faibles de France. Mais comme je le rappelais à l’instant, les mesures successives qui nous ont été imposées sont trop lourdes financièrement pour pouvoir les absorber avec les marges de manoeuvres restantes.

Il fallait en trouver d’autres, pas seulement pour “boucler” le budget 2016 mais également pour pouvoir dégager de nouvelles capacité d’autofinancement pour les années futures afin de pouvoir financer les services et les investissements nécessaires à notre population. C’est pour la même raison que, malgré un taux d’endettement très faible, nous n’avons pas recouru à l’emprunt cette année car le coût induit aurait eu un impact trop négatif dans l’immédiat.

Nous n’avions pas d’autres alternatives, nous avons donc combiné à la fois des mesures de réduction de nos dépenses (fonctionnement des services, subventions aux associations) et d’augmentation de nos recettes avec un recours - très modéré- à la fiscalité locale.

É. : Sur quoi la Ville met-elle la priorité en 2016 en termes d’investissements ?

Y. P. : Comme la majorité des communes, tout en maintenant les grands projets structurants comme la nouvelle cuisine centrale, qui est une priorité pour répondre aux besoins des enfants, et le foyer du troisième âge, nous avons revu à la baisse notre programme pluriannuel d’investissement. Avec le pays d’Aix est également engagé le réaménagement des entrées de ville, avenue de Nice et avenue d’Arménie.

Des financements croisés avec la CPA étaient contractualisés, nous espérons qu’ils seront maintenus par la Métropole. Je voudrais insister sur le fait que le désengagement de l’État vis-à-vis des communes, qui met d’ailleurs en grande difficulté de nombreuses entreprises privées du BTP notamment, ce n’est pas une fatalité. C’est le résultat de la persistance du gouvernement dans sa politique qui, au nom de la réduction des déficits, alimente le cercle vicieux du chômage et du dumping social, avec comme corollaire le développement de la précarité et de la pauvreté.

Ce sont des choix politiques que nous ne partageons pas, et nous nous battons pour qu’à l’avenir une autre alternative soit possible en mettant au coeur de l’action publique la satisfaction des besoins humains et la préservation des biens communs.

POINTS DE VUE CROISÉS

Rachid Abdelali
Directeur des affaires financières

" La Ville n’attend pas 2018 et le transfert de certaines compétences vers la Métropole pour prendre des décisions budgétaires. On anticipe les effets de l’entrée dans la Métropole qui s’ajoutent à la baisse des dotations de l’État. Ce sera une sorte de double peine. On va perdre des recettes et il faut diminuer notre niveau de dépenses. Les deux courbes vont bientôt se croiser. L’enjeu, c’est donc de redresser cet effet ciseaux en maintenant la qualité du service public municipal et en cherchant de nouvelles sources de recettes.

C’est le sens de l’étude sur le patrimoine de la Ville, qui devrait permettre de dégager des recettes et de diminuer les coûts d’entretien. Enfin, la préparation budgétaire 2017 a été avancée : elle commence ce mois-ci au lieu de septembre, et la Ville sera accompagnée par un bureau d’étude spécialisé. "

Georges Felouzis
Directeur du Centre communal d’action sociale (CCAS)

" La subvention que la Ville verse au CCAS est relativement stable à 920 000 € (-3%) sur un budget total de deux millions. Quand nous intervenons sur des missions complémentaires comme l’accueil des Roms, nous nous tournons vers l’État et le Conseil départemental pour qu’ils financent les actions que nous faisons à leur place. Mais quand les besoins d’aide sociale augmentent, avec le vieillissement de la population et la crise économique, et que les moyens financiers de l’État diminuent, il y a des choix à faire.

À Gardanne, on travaille le plus possible avec les structures partenaires comme la Caf, la MAIO, la Maison départementale de la solidarité, l’AAI, et les associations caritatives. Enfin, on est très attentif à tout ce qui concerne l’accès au droit lié au numérique car de plus en plus de démarches sont dématérialisées, pour le logement, l’énergie ou les prestations sociales. "

Karine Rougon
Responsable applicatifs métiers et chef de projet dématérialisation

" La dématérialisation avance, avec un budget de 40 000 € pour 2016. Les ins criptions pour les centres de loisirs sont désormais possibles via le portail famille, et l’on travaille à la construction d’un portail citoyen qui permettra à terme aux habitants de faire leurs démarches en ligne avec un identifiant unique. En ce qui concerne l’état-civil, Gardanne est désormais référencée sur service-public.fr. Il est possible de faire des demandes en ligne, qui génèrent l’envoi d’un mél. au service état-civil.

Le projet numérique de la médiathèque est en cours, le matériel informatique va être renouvelé cette année et des tablettes et liseuses vont être achetées. Enfin, la transmission des actes administratifs vers la Sous-préfecture est désormais dématérialisée, et les délibérations des Conseils municipaux le sera dès le mois de septembre. "