Grandes manœuvres pour 2005

Alcan-Pechiney : quelle restructuration ? Stéphane Conty

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Alors qu’il vient de racheter le groupe Pechiney, l’industriel Alcan prévoit pour 2005 la scission de l’entreprise en deux entités distinctes et envisage, selon la CFDT, une restructuration, avec le cortège de licenciements qui l’accompagne toujours... Pour l’instant, l’usine de Gardanne n’est pas touchée.

En 20 ans les besoins mondiaux en aluminium sont passés de 10 à 27 millions de tonnes par an. Dans le même temps le producteur d’aluminium Pechiney a fermé 7 de ses usines en France. Maintenant intégré au groupe Alcan, un nouveau plan de restructuration se profile qui devrait conduire à la suppression de 2 200 emplois en Europe, dont 960 en France. Ce sont essentiellement 5 établissements qui sont menacés de fermeture, dont celui de Lannemezan (Hautes-Pyrénées) vers lequel Pechiney Gardanne envoie annuellement 200 000 tonnes d’alumine.
Dès sa prise de contrôle de Pechiney, Alcan a procédé en avril à une restructuration des sièges sociaux, avec la suppression de 331 postes et des obligations de mutations pour certains salariés. Ces mutations concernent des transferts de postes de Paris vers Zurich ou Montréal par exemple. En cas de refus de mutation les salariés sont tout bonnement licenciés. Alcan remet aussi en question le droit syndical français qu’il juge trop complexe et contraignant, et qu’il entend “simplifier” au sein de l’entreprise...
Même si pour l’instant il semble que le site de Gardanne ne soit pas concerné par ces mesures, à terme il risque d’en subir les conséquences. L’établissement gardannais déficitaire au printemps dernier accentue actuellement sa spécialisation vers les alumines techniques, un marché en constante expansion.
Ayant réussi depuis à équilibrer ses comptes, et même à dégager un léger bénéfice, il semble pour l’instant hors de danger. Toutefois, la restructuration du groupe qui devrait avoir lieu prochainement pourrait remettre en cause ce nouvel équilibre. Surtout que l’entreprise doit faire face a de nouveaux enjeux. Ainsi, l’ouverture du marché de l’électricité pour les entreprises en juin dernier a conduit à une augmentation de 20 à 60 % des prix. Jusqu’ici Pechiney avait un contrat avec EDF et payait 19 euros le MW, mais le contrat arrivant à terme, le prix moyen du marché est maintenant de 41 euros le MW. Or l’industrie de l’aluminium est classée dans les industries dites électro-intensives, un site comme celui de Saint-Jean de Maurienne dans les Alpes consomme autant que la ville de Lyon ! Et quand on sait que pour un producteur d’aluminium le coût de l’énergie représente 30 % du prix de revient on imagine aisément les risques de délocalisation des entreprises vers des pays où le coût énergétique est moindre.
Concernant Gardanne, Georges Selva, délégué CGT insiste sur le fait qu’ « il y a nécessité pour le développement des alumines techniques, et donc la pérennisation de l’entreprise de Gardanne, de construire un four supplémentaire, ainsi que de nouveaux silos. Sans ces investissements nous ne pouvons pas envisager un réel avenir sur du long terme. Il faut aussi considérer le fait que nous devons nous tourner vers un développement durable, plus soucieux de l’environnement, ce qui a aussi un coût. » Concernant tous ces investissements, Alcan n’a jusqu’ici pas jugé utile de faire des propositions. Mais il est vrai que les attentes de forte rentabilité immédiate de la part de ses actionnaires, notamment les fonds de pensions américains, ne s’encombrent pas de ce genre de considérations.

Lors du Conseil municipal du jeudi 23 septembre 2004, Philippe Pintore élu au développement économique a proposé une motion de soutien aux salariés de Pechiney, déclarant « contrairement aux engagements pris par le PDG au moment du rachat, il semblerait que des projets de licenciements arrivent maintenant. En autorisant le rachat de Pechiney par Alcan, alors qu’il pouvait s’y opposer, le gouvernement de Monsieur Raffarin a permis ce nouveau mauvais coup porté à l’industrie de notre pays. Le Conseil municipal de Gardanne demande aux Pouvoirs Publics de s’opposer à ces fermetures et assure les personnels des usines et les communes concernées de son entier soutien. »