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A Charpak, la citoyenneté est au programme Energies 348 - Bruno Colombari

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Depuis l’automne, les 73 élèves ingénieurs de première année au CMP Georges Charpak s’investissent chaque semaine dans des activités citoyennes et associatives intégrées à leur cursus scolaire et sur lesquelles ils seront évalués. La moitié de ces activités concerne directement Gardanne.

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Centre microélectronique Charpak

Émilie Jouanny est élève ingénieur en première année au centre Charpak. Ce mercredi, elle retrouve à la Maison du Peuple les enfants du foyer d’accueil Delta Sud qui fêtent Noël. Comme trois autres étudiants de sa promotion, Émilie a choisi Delta Sud comme activité citoyenne et associative (ACA), obligatoire cette année. « Avec une autre fille, nous nous occupons des enfants les plus jeunes, les 3-7 ans, et les deux garçons prennent en charge les 9-15 ans. Nous avons choisi le thème de la découverte scientifique. On a construit un circuit automobile en carton, puis en Lego©, et ensuite on en fera un en Meccano©. Après, on s’attaquera à des hélicoptères. On fera aussi des expériences du genre de celles de la fête de la science. En début d’année, on a rencontré la directrice du foyer, puis les enfants et les éducateurs. »

Florian Deleuil ajoute : « avec les ados, on aborde des phénomènes scientifiques comme les volcans, les séismes, les galaxies, les comètes, mais aussi le corps humain, l’ADN, le génome, le climat... On évite de faire du scolaire, on leur explique qu’ils peuvent poser des questions, qu’il n’y a pas de questions bêtes. On découvre ensemble l’ADN d’une banane, par exemple, ou comment faire entrer un oeuf dans une bouteille. » Si les enfants ont eu besoin de temps pour s’y mettre, ils attendent désormais les élèves ingénieurs avec impatience.

L’objectif des ACA, c’est de faire en sorte que les élèves ingénieurs s’impliquent dans des activités autres qu’académiques, comme le prévoit la charte de l’ingénieur : « l’ingénieur est un citoyen responsable assurant le lien entre les sciences, les technologies et la communauté humaine : il s’implique dans les actions civiques visant au bien commun.  »

Dix-huit activités citoyennes et associatives ont ainsi été élaborées, dont huit concernent Gardanne : les animations scientifiques dans les accueils de loisirs (dans le prolongement du travail commencé avant la Fête de la Science), la mise en place d’un site internet pour Citoyen solidaire, un projet de chalet des énergies renouvelables en lien avec le parc photovoltaïque des Sauvaires, des interventions à la Maison de retraite dans le cadre du programme Vieillir avec succès, un travail avec les pensionnaires de la Chrysalide ou encore des initiatives entre Ingénieurs sans frontières (ISF) et le CCFD.

« Après un travail avec les élèves sur les questions d’éthique, on leur a présenté les différents projets, ils ont eu cinq semaines pour choisir, explique Jean-Paul Ramond, directeur général de la formation du centre Charpak. Comme c’est la première année, il y a eu quelques difficultés au démarrage, certains projets n’ont pas abouti et ont dû être modifiés. Une évaluation se fera tout au long de l’année.  »

Dans l’emploi du temps de la semaine des première année, les mercredis après-midi ont été libérés pour les ACA. Ce qui représente 40 heures par semestre et par élève. A Saint-Étienne, un projet ressemblant existe déjà (développement en management des ingénieurs) mais il ne concerne que les première année et n’engage pas de partenariat avec la Ville.

Parmi ces initiatives, les Cordées de la réussite s’inscrivent dans une démarche nationale initiée par les ministères de l’enseignement supérieur et de la politique de la ville. L’État a d’ailleurs annoncé vouloir doubler le nombre de Cordées en France en 2011 (300 sont prévues) et de porter leur financement à 5 millions d’euros. Un rapide calcul permet d’évaluer donc les moyens mis pour chaque cordée à environ 16 000 €. Or, Jean-Paul Ramond n’a obtenu auprès du Préfet de région qu’une toute petite enveloppe de 2 000 € pour cette année... 2 000 € pour financer les actions de treize élèves ingénieurs et d’environ 26 collégiens et lycéens suivis (Neuf du Pesquier, huit de Péri, cinq du lycée Fourcade et trois du lycée de l’Étoile). Une misère.

« Les Cordées, ce ne sont pas de l’aide aux devoirs, précise Jean-Paul Ramond. C’est un accompagnement culturel et scientifique auprès de bons élèves du secondaire issus de milieux défavorisés, avec pour objectif de les conduire vers des études supérieures. Nous voulons impliquer les parents dans l’opération. Le suivi peut se faire au Centre, mais aussi dans les établissements scolaire, à la Médiathèque, ou même chez les élèves. »

Ludovic Portpin, étudiant de première année, reçoit ce mercredi de décembre Mickaël et Quentin, deux élèves de cinquième du collège Péri. Deux élèves plutôt doués, puisqu’ils ont fini le premier trimestre avec des moyennes générales entre 16 et 17. Ils correspondent donc au profil recherché pour les Cordées de la réussite, d’autant que plus tard, le premier aimerait devenir médecin, et le second ingénieur. C’est donc avec intérêt qu’ils ont visité le centre Charpak lors de leur première rencontre avec Ludovic, qui leur a présenté les lieux. Avec ce dernier, ils parlent orientation, notamment celle nécessaire pour intégrer une école d’ingénieurs comme celle de Saint-Étienne.

« Tu peux faire un bac S, ou STI, puis deux ans de classe préparatoire après le bac. Ça veut dire beaucoup de maths et de physique, mais aussi un bon niveau en anglais et en français. » A Mickaël, il explique que « si tu veux être médecin, il faudra aller à la fac, avec une première année difficile car il y a beaucoup de monde, et ensuite les études sont très longues. Mais il est possible de combiner médecine et bioélectronique, c’est intéressant. »

Ludovic et les collégiens ne parlent pas qu’orientation, ils discutent aussi culture, concert classique, opéra, films en version originale (« un très bon moyen pour progresser en anglais sans s’en apercevoir ») ou musée. C’est la dimension ouverture culturelle des Cordées, pas la moins importante. C’est aussi celle qui nécessite un minimum de moyens.